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Publié par BALCHOY

Le sous-sol désigne donc une situation matérielle autant que morale et existentielle.

 

            La réflexion de l’homme souterrain, moins confuse qu’il n’apparaît au premier abord est née d’une constatation primordiale : c’est la conscience qui fait l’homme.

 

Rien de plus important dans la vie que d’aiguiser cette conscience. Voilà le grand but de sa vie. Mais en même temps sa lucidité lui a fait faire une tragique découverte : « une conscience trop clairvoyante, c’est une maladie… très réelle, car elle est source de bien des tourments. »(3)

 

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Le sous sol, page 688

 

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Sans doute peut-on les éviter en se contentant d’une conscience ordinaire, c'est-à-dire d’une « portion égale à la moitié, au quart de celle qui est octroyée à l’homme cultivé du XIX ème siècle. ».

 

Telle est la solution des hommes d’action  « à caractère » comme on dit, à cause de leur sincérité et de leur spontanéité ». Renonçant à remonter aux causes premières, ils se tranquillisent aisément et vivent en une paix facile, s’imaginant avoir trouvé des raisons solides et valables à leur activité. Notre locataire les assimile avec mépris  aux fameux « homme de la nature et de la vérité » de Jean Jacques Rousseau. A la vraie conscience de soi, ils ont préféré la tranquillité abêtissante, mais peut-être, ajoute-t-il insidieusement est-ce là l’état normal ? Nul doute qu’ils sont coupables de cet état de choses et, qui plus est, coupables sans l’être en somme, puisqu’ils ne sont en tout cela que la victime innocente des immuables lois de la nature. Leur seul tort est d’être plus intelligent que le troupeau des médiocres qui l’entourent.

 

            Tout en feignant de les respecter, l’homme souterrain se livre à une critique virulente de ces « êtres bornés » qui ont choisi l’action plutôt que la réflexion. Ils sont de loin les plus nombreux dans la société et notre homme reconnaît sans peine que la conscience aigue telle qu’il l’a conçoit est une anomalie. Elle est cause de bien des souffrances ; de plus son fruit » naturel et légal est l’inertie. »(1)

 

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Le sous sol, page 698

 

 

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La réflexion de notre locataire se nourrit d’une expérience existentielle multiforme qu’il décrit synthétiquement avant d’en analyser les composantes.

 

 

            Celui qui s’abandonne aux impulsions de sa conscience et la laisse libre de scruter à son gré le fond des choses devient incapable d’agir soumis qu’il est à une sorte de « décomposition chimique du réel »  qui résulte des lois mêmes de la nature humaine. C’est que pour aiguiser sa conscience, il en vient à viser alternativement les situations les plus antagonistes et les plus contradictoires. Son « moi » réussit parfois ainsi à s’ouvrir à une plus grande clarté mais au prix de combien d’abjections :

 

 

            Plus claire était ma conscience du bien et du mal et de toutes les choses « belles et sublimes », plus profondément je m’enfonçais dans ma boue… Mais ce qui était particulièrement remarquable, c’est que ce désaccord ne me paraissait pas chose fortuite, dépendante des circonstances mais semblait aller de soi, se produire tout naturellement. On aurait dit que c’était mon état normal et nullement une maladie ou un vice… Pour finir donc, j’admis presque (peut-être bien que je l’admis) que tel était l’état normal de mon esprit. Mais au début, que de souffrances j’endurai dans cette lutte. » (2)

 

 

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Le sous-sol page 689 ; on remarque l’allusion à l’idéalisme et au sentimentalisme. Dostoïevski rejette ici ce qu’il avait adoré en sa jeunesse.

 

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 Yvan Balchoy

balchoy@belgacom.net

 

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