MUMIA ABU JAMAL, ETAT DE¨PENSYLVANIE / UNE DECISION INFAME ET REVANCHARDE
FONDATION FRANTS FANON
Président d’Honneur : Aimé Césaire
Une violation de la Constitution américaine
Un appel international [1] demandant l’abrogation de cette loi anticonstitutionnelle et scélérate a été lancé en octobre, la Fondation Frantz Fanon l’a signé.
Signez-le ; faites le signer : http://www.bringmumiahome.com/
Mumia Abu Jamal, pour toutes celles et tous ceux qui résistent aux discours de propagande et aux manipulations, est un homme debout qui ne recule devant aucun obstacle. Pour tous ceux qui estiment faire partie de l’axe du bien, de la bien-pensance et de la doxa ultralibérale Mumia Abu Jamal fait frémir d’indignation. Ceux-là n’ont de cesse de le réduire au silence et de demander un nouveau procès pour réclamer, une fois encore, la peine de mort.
En septembre dernier, alors qu’il avait été invité, par des étudiants, à clôturer l’année universitaire du Goddard College [2], Mumia avait évoqué, avec émotion et poésie, les années [3] qu’il y avait passées et celles [4] pendant lesquelles il avait obtenu son diplôme. Ces années entre les murs de haute sécurité de la prison de Greene où il est resté, durant 29 ans, totalement isolé dans le couloir de la mort [5] avant d’être transféré dans la prison de Frackville -après que sa peine de mort a été commuée en peine d’emprisonnement à vie sans aucune liberté sur parole-. L’ensemble de ses années à Goddard College ont « éveillé en » lui « la passion d’apprendre ».
Les soutiens du policier -William Faulkner-, qu’il est accusé avoir tué, alors qu’il a toujours clamé son innocence et qu’il y a eu un certain nombre de dysfonctionnements juridiques, se sont élevés contre cette voix libre qui sait se faire entendre et que l’on écoute, quelle que soit sa provenance.
En quelques jours, les partisans d’un ordre basé sur la violation du droit à la liberté d’expression ont mené campagne. Le syndicat, Fraternal Order of Police [6], auquel appartenait William Faulkner a fait de Maureen Faulkner –femme de William- son égérie et l’a propulsee en première ligne dès qu’il s’agit de Mumia Abu Jamal et de revendiquer une révision du procès en vue de l’application de la peine de mort. Il appelait, par la voix de son Président [7], le Goddard College « on behalf of the 330,000 members of the Fraternal Order of Police, our families and the families of the fallen officers I urge—in the strongest possible terms—to rescind its invitation to this repugnant murderer”.
Alors que Mumia, depuis des années, s’exprime, une fois par semaine, entre autres sur Prison Radio [8], le discours [9] à Goddard College, a enflammé les milieux partisans de la peine de mort ; Maureen Faulkner a affirmé, lors d’une interview à CNN, que "It’s a disgrace that you have to even hear his voice. My husband has been dead for 32 years and his voice was taken from him by Abu-Jamal".
Elle a essayé de faire interdire ce discours, appelant aussi bien la porte-parole du Goddard College mais aussi le service de presse du Département des Corrections [10] de Pennsylvanie, "We have tried to intervene but we have been told by the court that we can’t because we are disappointed that a college would choose to have a convicted murderer, especially a cop killer, be their commencement speaker," lui a répondu, dépitée, l’attachée de presse du Département des Corrections, Susan McNaughton.
Pour toutes ces personnes et particulièrement pour Maureen Faulkner, Mumia Abu Jamal reste “(…) a despicable, callous, dangerous man and people try to put him on a pedestal and make him into something he is not. What can Abu-Jamal offer anyone after he so violently took my husband’s life ?"
Mécontents de n’avoir pu fait prévaloir leur toute puissance et l’idée qu’ils se font des droits inhérents à toute personne humaine, dont la liberté d’expression garantie par le Premier Amendement [11] de la Constitution américaine, ils ont mené campagne pour obtenir de l’Etat de Pennsylvanie une loi interdisant à l’ensemble des prisonniers de faire des déclarations publiques sur les crimes pour lesquels ils ont été condamnés. Cela vise, évidemment, Mumia Abu Jamal qui, selon eux, a perdu tous ces droits, ce que confirme Maureen Faulkner "He stepped out of society when he put a bullet between my husband’s eyes. Just as he took my husband’s freedom and life, he lost his rights. Why does he have constitutional rights ? My husband doesn’t have any. He is 6 feet underground".
Mike Vereb, républicain de l’Etat de Pennsylvanie, a réussi, en procédure d’urgence à faire voter le projet de loi [12] « Revictimization Relief Act » ou plus communément nommé “Muzzle Mumia Law » visant à priver les prisonniers de leur droit à la liberté d’expression. Mais cette loi va plus loin puisqu’elle a aussi, dans sa ligne de mire, les soutiens des personnes emprisonnées, y compris leurs avocats.
Peu de temps après, le gouverneur de l’Etat, Tom Corbett, l’a signée malgré les oppositions de certains élus dont le sénateur, Daylin Leach, pour qui cette loi constitue « la plus extrême violation du Premier amendement de la Constitution car elle empêche tout prisonnier de s’exprimer sur toute question par crainte d’une poursuite civile en représailles ».
De nombreuses organisations de juristes et d’avocats ont réagi contre cette violation de la Constitution américaine, entre autres le directeur [13] du Law Abolitionist Centre pour qui « this illegal attack on our clients’ constitutional and human rights will be fiercely challenged in the streets and the courts” mais aussi un très grand nombre de soutiens à Mumia Abu Jamal. Tous dénoncent cette décision anticonstitutionnelle, dont Mumia Abu Jamal [14] lui-même qui, l’accueille avec une certaine ironie “Governor Corbett’s signature on an unconstitutional bill that proves that the government of Pennsylvania, the executive and the legislature, don’t give one wit about their own constitution of the Commonwealth of Pennsylvania, nor the United States Constitution” et souligne que “they are the outlaws”.
Ce 10 novembre, s’est ouvert, à Pittsburgh, le procès introduit par des organisations [15] des droits humains d’une part au nom de Mumia lui-même et d’autre part en leur nom propre. Les juges devront répondre à cette question que pose Mumia, “how can the state’s legislators pass and politicians sign the recent law described as the ‘Muzzle Mumia Act’” alors qu’ils savent qu’ils violent sciemment et volontairement la Constitution des États-Unis, celle de l’État de Pennsylvanie mais aussi le serment qu’ils ont pris de tout faire pour ne pas les violer ?
Depuis plus de 30 ans, Mumia Abu Jamal voit ses droits civils et politiques niés, violés. A l’heure actuelle, l’Etat de Pennsylvanie tente de le réduire au silence [16] et de le museler mais depuis son premier procès, ses droits à un procès juste et équitable et à être entendu n’ont pas été respectés. Dès lors n’y a t-il pas eu, pendant le premier procès, une inobservation, totale ou partielle, des normes internationales relatives au droit à un procès équitable, énoncées dans la Déclaration universelle des droits de l’homme, dans la Convention interaméricaine des droits de l’homme et dans les instruments internationaux pertinents ?
Dès lors, n’est-il pas légitime de questionner la privation de liberté dont est victime Mumia Abu Jamal car ne violerait-elle pas certaines normes internationales pertinentes énoncées aussi dans la Déclaration universelle des droits de l’homme ou dans les instruments internationaux ratifiés par les États-Unis ?
Mumia Abu Jamal ne pourrait-il pas saisir le Comité des droits de l’Homme ou la Cour Interaméricaine des droits de l’homme au titre des articles 8 [17] et 25 [18] ?
Cette privation de liberté qu’il subit depuis décembre 1981 ne revêt-elle pas un caractère arbitraire ?
Ne pourrait-il pas être fait référence à la décision de la Cour interaméricaine des Droits de l’Homme qui, confrontée à une affaire [19] de détention arbitraire en contravention de l’article 7 de la Convention américaine des droits de l’homme, a conclu, après révision de la preuve, que la victime, soumise à un enfermement excessif, a souffert de violences psychologiques durant sa détention ? Or, la vulnérabilité exacerbée de l’individu placé dans une telle situation engendre “a real risk that his other rights, such as the right to humane treatment and to be treated with dignity, will be violated [20]”.
Ainsi, le confinement de Mumia Abu Jamal en cellule isolée, sans aucun contact avec d’autres détenus, pendant 30 ans, crée une souffrance psychologique équivalant à la torture dont la pratique est interdite [21].
La Cour interaméricaine des droits de l’homme affirme, après avoir passé en revue les instruments internationaux et régionaux relatifs à l’interdiction de la torture ainsi que les pratiques des systèmes onusien et européen, « that torture is strictly prohibited by international human rights law. The prohibition of torture is absolute and non-derogable, even in the most difficult circumstances, such a war, the threat of war, the fight against terrorism, and any other crime, martial law or state of emergency, civil war or commotion, suspension of constitutional guarantees, internal political instability, or any other public disaster or emergency [22]”.
Le droit à l’intégrité personnelle de Mumia Abu Jamal ainsi que celui de ses proches est-il garanti alors qu’il est toujours en prison, sans réelles et tangibles preuves ?
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http://fondation-frantzfanon.com/article2259.html