LE CAS DE GEORGES IBRAHIM ABDALLAH - UN TEST POUR LA FRANCE (REEDITION HELAS NECESSAIRE A CAUSE DE LA LACHETE DU GOUVERNEMENT FRANCAIS QUI PERDURE)
XARLO@aol.com
À djamal.benmera
article de Politis:
Certes, c’est bien le tribunal d’application des peines qui se prononcera le 5 novembre pour ou contre la libération du plus ancien prisonnier politique d’Europe, détenu dans la centrale de Lannemezan. Mais chacun sait que la véritable décision appartient au Premier ministre et au président de la République. Et nul n’ignore non plus que deux pays, les États-Unis et Israël, et leurs pseudopodes en France exercent des pressions pour qu’Abdallah reste en prison. Le président du Crif, Georges Cukierman, l’a encore demandé publiquement
vendredi sur Canal +. libérable en 1999, Abdallah est aujourd’hui détenu sans aucune justification juridique. Même si ce n’est plus le problème, puisqu’il a purgé sa peine, il faut rappeler les conditions de son arrestation, et surtout de sa condamnation. Après avoir été
membre du Front populaire pour la libération de la Palestine, Abdallah est devenu, en 1984, responsable de la Fraction armée révolutionnaire libanaise (Farl). Le contexte est alors celui de la guerre civile libanaise et de l’invasion du Liban par Israël en 1978. Nous sommes deux
ans après le massacre des camps de Sabra et Chatila par des supplétifs de l’armée israélienne. Des groupes pro-palestiniens réagissent par une série d’attentats. À Paris, début 1982, coup sur coup, un attaché militaire américain puis un conseiller de l’ambassade d’Israël sont abattus. Arrêté dans la capitale française en octobre 1984, Abdallah n’est pas mis en cause directement dans ces attentats. Il n’est d’ailleurs condamné en 1986 qu’à quatre ans de prison pour « association de malfaiteurs ». Mais, alors qu’il est encore en attente de son procès, la France dépêche un émissaire pour négocier un échange entre Abdallah et le diplomate français Gilles Sidney Peyroles, enlevé au Liban. L’affaire est conclue et les ravisseurs tiennent parole. Pas la France. Peyroles est libéré, mais Abdallah reste en prison. Au cours
d’une opportune perquisition effectuée au domicile parisien d’Abdallah le jour même de l’accord, les limiers de la DST ont découvert des explosifs.
Rejugé en octobre 1987, le militant pro-palestinien, devenu l’ennemi public numéro un, est cette fois condamné à la réclusion à perpétuité. Ce qui signifie qu’il est en
effet libérable en 1999. Une libération qui lui a déjà été refusée à huit
reprises pour « risque de récidive ».
Un motif doublement absurde.
D’abord parce qu’il serait aussitôt expulsé vers le Liban, qui s’est engagé à l’accueillir. Ensuite et surtout parce que le contexte a complètement changé depuis la fin des
années 1980. Abdallah n’est pas un « jihadiste », c’est un militant communiste d’un de ces mouvements laïques qui, depuis lors, ont été laminés par la répression.
Mais la DST est allée jusqu’à produire ce qu’il faut bien appeler un faux en affirmant qu’Abdallah, issu d’une famille chrétienne, s’est converti à l’islam. Ce qui, jusqu’à preuve du contraire, n’est pas un délit dans notre République, mais est tout simplement inexact.
Personne, d’ailleurs, ne croit au motif avancé. À commencer par la justice, qui, en novembre 2012, décide la remise en liberté du prisonnier à condition qu’il soit expulsé vers son pays. Mais c’est alors le ministère de l’Intérieur qui bloque l’arrêté d’expulsion.
Aujourd’hui, de nombreuses voix s’élèvent pour dénoncer ce que l’avocat Jean-Louis Chalanset appelle « une vengeance d’État » et pour demander la libération de Georges Ibrahim Abdallah.
Jusqu’au préfet Yves Bonnet, directeur de la DST entre 1982 et 1985, et qui a participé à son
arrestation (1).
Alors pourquoi ce blocage ? Quelle opinion faut-il flatter ? Quelles pressions s’exercent sur le gouvernement français ? L’ambassade américaine agit à terrain découvert, au point de s’inquiéter, en novembre 2012, « du danger [qu’Abdallah] représenterait pour la communauté internationale s’il était libéré ». Paris va-t-il enfin résister ? Il en va aussi de notre état de droit.
Laissons le dernier mot à Yves Bonnet, qui a plaidé le 24 octobre sur Canal + pour « l’exercice normal de la justice »,car, dit-il, « rien ne justifie qu’on applique à cet homme un régime spécial ».
Et c’est finalement la seule question qui vaille. Faut-il que la peine de Georges Ibrahim Abdallah se poursuive indéfiniment parce que cet homme, contrairement à ce qu’exige le président du Crif, refuse d’abjurer ses convictions ?
DENIS SIEFFE
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