Publié par POESIE-ACTION
09-04-25- PROTECTIONNISME AMERICAIN OU EUROPEEN LIBRE-ECHANGISTE :DEUX FACES DU CAPITALISME IMPERIALISME MODERNE (GEORGES GASTAUD - LE GRAND SOIR)
NOTE D'YVAN BALCHOY)
Georges Gastaud sur Initiative communiste signe un éditorial,comme d'habitude plein de bon sens.

Par Georges Gastaud, responsable du Secteur Etudes et Prospective du PRCF, et Michel Cohen, secrétaire de sa commission Economie – Avec le soutien de Fadi Kassem, secrétaire national.
Paris – avril 2025 – Percutant brutalement l’économie mondiale, le déluge de droits de douane édictés par Trump et par son équipe réactionnaire (sans l’avis du Congrès : quelle belle « démocratie » que celle des USA !) ne manquera pas de provoquer des effets graves, non seulement sur l’emploi et sur le pouvoir d’achat des travailleurs de tous les pays, y compris sur la situation des ouvriers américains, mais sur l’ensemble des relations internationales déjà très dégradées qui caractérisent le monde contemporain. Il s’agit pour Trump, non seulement de brutaliser ses ennemis stratégiques, Chine populaire en tête (ne parlons même pas de Cuba et du Venezuela strangulés au quotidien, ni du Vietnam à l’encontre duquel Trump exerce une méprisable vendetta historique), mais de « tordre le bras » de l’Union européenne inféodée à la grande industrie allemande exportant en Amérique et fortement assise sur la zone euro-mark (1). La France sera d’autant plus perturbée par l’actuel déchaînement trumpiste que, depuis le désastreux plan Charbon-Acier des compères Monnet et Schuman (années 1950), l’oligarchie qui dirige notre pays a saccagé le produire en France en sacrifiant à la « construction européenne » sous dominance berlinoise la grande industrie, la pêche artisanale, la recherche scientifique, les services publics et l’agriculture paysanne de notre pays, tout cela au nom de la sacro-sainte « économie de marché ouverte sur le monde où la concurrence est libre et non faussée » qui est gravée dans les traités européens successifs.
Pour autant, les grands médias de la Macronie à la remorque de l’U.E.-O.T.A.N. ne nous feront pas regretter le « libre-échangisme », du reste terriblement faussé (Trump fait comme si, depuis des décennies, l’impérialisme US n’imposait pas au monde son dollar inconvertible, ses règles économiques asymétriques et ses « sanctions extraterritoriales » excluant du commerce mondial des centaines de millions d’humains!) qui caractérisait en théorie la mondialisation néolibérale régie par l’O.M.C. et désormais envoyée par Trump à la casse. En réalité, le déluge protectionniste trumpiste est largement le contrecoup des excès terrifiants dus à la mondialisation néolibérale qui, de la Rost Belt (« ceinture de la rouille ») des USA à la France ouvrière et paysanne détricotée par Maastricht, s’est partout traduite par la délocalisation des industries et par le déclassement massif des enfants de la classe ouvrière, de la paysannerie laborieuse et d’une partie des couches moyennes. Laissons donc les bureaucrates « apolitiques » des confédérations euro-formatées, les rousselants « communistes » décaféinés de l’état-major P.C.F., les néo-militaristes verts, les imprécateurs guerriers de « Place publique » et les « socialistes » MEDEF-compatibles à la François Hollande appeler Ursula von der Leyen à mener la guerre commerciale avec les USA tout en construisant une périlleuse « économie de guerre » tournée contre la Russie: nous, militants franchement communistes et anti-impérialistes du PRCF, nous ne perdrons pas le Nord face à la montée des périls et nous n’oublierons pas que l’UE en marche vers la guerre continentale à l’Est n’est nullement meilleure que les USA. Au contraire, elle dépendante servilement de Washington sur tous les plans (militaire, technologique, culturel, linguistique…). Surtout, l’on ne combat pas l’hégémonisme étatsunien en soutenant son alter ego européen copiloté par le militarisme allemand résurgent, par l’hystérique russophobie anglaise et par un impérialisme français d’autant plus agressif qu’il perd pied en Afrique et que la caste politique « française » est de plus en plus méprisée par le peuple travailleur de l’Hexagone, ainsi que le prouve l’interminable crise politique actuelle.
En réalité, mondialisation néolibérale et réaction national-protectionniste, parti « démocrate » et parti « républicain » étatsuniens sont les deux faces du même capitalisme-impérialisme erratique, fascisant et guerrier. Dans les faits, comme la mondialisation néolibérale – libéralisme en apparence, domination mondiale des monopoles capitalistes en fait ! -, le protectionnisme trumpiste est une expression particulièrement agressive du capitalisme monopoliste d’Etat, cet avatar du capitalisme-impérialisme: sa quintessence cyniquement proclamée est du reste le complexe militaro-industriel, médiatique et financier dont Macron, von der Leyen, Trump, Biden et autre Musk sont des incarnations tout aussi menaçantes pour l’avenir du genre humain en général et pour celui de la population française en particulier.
Alors que s’aggravent tous les antagonismes mondiaux, qu’il s’agisse du conflit planétaire entre l’hégémonisme euro-atlantiste et les BRICS, des rivalités inter-impérialistes opposant provisoirement les deux rives de l’Atlantique, ou plus fondamentalement, de la contradiction qui va s’aiguisant entre Capital et Travail (cf la montée des grèves de masse ces dernières années: Inde, Bangladesh, Mexique, U.S.A, Corée du Sud, Grande-Bretagne, Québec, et maintenant Grèce, Belgique, voire Italie…), l’alternative pour le mouvement ouvrier ne consiste pas à « choisir » entre les deux faces, « démoblicaine » ou « répucrate », du grimaçant Janus impérialiste, encore moins à soutenir « notre » Europe contre « leurs » U.S.A., mais à combattre le capitalisme-impérialisme dans son ensemble, et tout particulièrement, celui auquel nous faisons face ici. Pour cela, il faut se souvenir du conseil formulé par le vaillant député socialiste allemand Karl Liebknecht en août 1914: face à la guerre enclenchée par le Kaiser, face à l’ « union sacrée » belliciste que ralliait alors la social-démocratie allemande à laquelle il appartenait encore formellement, Libknecht osa proclamer : « l’ennemi principal est dans ton propre pays ». Ce qu’à notre époque d’euro-mondialisation capitaliste, il faut savoir ajuster en ajoutant que pour nous, qui vivons dans le pays le plus belliciste de l’hyper-belliciste U.E., l’ennemi principal se trouve sur notre propre continent : pseudo-libéral ou faussement « national », l’hégémonisme euro-atlantique dans son ensemble reste le danger principal pour la paix mondiale, la souveraineté des peuples, les conquêtes sociales, l’environnement et les libertés démocratiques.
Aucun soutien donc, ni à l’hyper-réactionnaire Donald Trump, ni à la pseudo-« progressiste » et de moins en moins « démocratique » Union européenne ! Ensemble donc, militons pour que la France sorte, par la voie du combat de classe, des nationalisations démocratiques et du pouvoir populaire, de l’U.E.-O.T.A.N. mortifère pour bâtir une nouvelle République sociale, souveraine et pacifique en marche révolutionnaire vers un socialisme-communisme de nouvelle génération.
[1] note de Georges Gastaud – Nous avons suggéré par ailleurs l’hypothèse que l’euro, qui se présentait originellement comme le socle du libre-échangisme européen, voire extra-européen, était en fait une monnaie crypto-protectionniste destinée à faire coup double, principalement à l’avantage de l’impérialisme allemand hégémonique en Europe: l’existence d’une monnaie unique européenne empêchait par ex. les pays du Sud européen, France inclue, de procéder périodiquement à des « dévaluations compétitives » de ses monnaies nationales (lire, franc, etc.) afin de préserver leurs industries et d’exporter ses produits manufacturés vers l’Allemagne tandis que, complémentairement, la politique longtemps maintenue de « l’euro fort » chère à Berlin garantissait aux U.S.A., en gros jusqu’aux années 2008/2010 (crise dite des « subprimes »), que les voitures allemandes n’inonderaient pas le marché américain protégé par le dollar faible. Bref, il s’agissait déjà en fait, sous l’allure générale d’une ouverture au libre-échange mondial, d’un accord crypto-protectionniste et inter-impérialiste entre le grand capital étatsunien et le grand capital euro-germanique. Or, à la suite de la crise de 2008, la B.C.E. a méthodiquement détruit cet accord tacité entre les deux bandits capitalistes se partageant les deux rives de l’Atlantique. La B.C.E. a méthodiquement affaibli l’euro pour relancer la croissance européenne si bien que les marchandises allemandes ont envahi le marché américain suscitant à moyen terme l’ire des industriels étatsuniens liés à Trump. Le fragile accord monétaire inter-impérialiste qui avait initialement permis aux Américains de se protéger du Made in Germany tout en permettant à la grande industrie allemande d’écraser l’industrie européenne méridionale s’est alors effiloché et c’est l’une des raisons souterraines de l’affrontement inter-impérialiste actuel entre les deux pôles de l’hégémonisme euro-atlantique. Bien entendu, le « protect-trumpisme » actuel est surdéterminé par le fait que la Chine, qui a d’abord dérivé vers une forme de subordination au néolibéralisme libre-échangiste (la mondialisation régie par l’O.M.C.) voulu par Washington, a su maîtriser peu à peu son nouveau maître provisoire en prenant peu à peu les rênes du marché mondial sur la base de ses intérêts nationaux et de son « socialisme de marché » piloté par le PC chinois. Bien évidemment, la guerre en Ukraine est également une manière pour les U.S.A. de « plomber » les concurrents européen, coréen et japonais (de leur occasionner de nouvelles dépenses improductives) tout en menaçant militairement les « ennemis systémiques » russe et chinois. Du reste, la politique permanente de « sanctions » et de « lois extraterritoriales » assorties d’inhumains embargos économiques montre que le « libéralisme » prétendu de la période précédente était déjà très largement fictif et mensonger.
Tout cela dénote la profonde stupidité des « marxistes » qui justifient l’euro, cette arme de guerre interne et externe du capital impérialiste européen, comme une prétendue « maison commune » aidant à pacifier les relations économiques de l’Union européenne: en réalité, après avoir largement détruit la France, l’euro est sur le point de dynamiter la paix mondiale.