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Publié par YVAN BALCHOY

 


ÉLYSÉE ET GOUVERNEMENT

Ministres et députés : le tour de passe-passe constitutionnel du gouvernement Attal
Gabriel Attal et seize membres du gouvernement sont à la fois au gouvernement, chargés des affaires courantes, et au Parlement, députés depuis le 7 juillet. Une situation qui a facilité la réélection de Yaël Braun-Pivet et qui suscite un débat animé, au nom de l’atteinte à la séparation des pouvoirs.

Ilyes Ramdani

19 juillet 2024 à 09h20

 
 
Le gouvernement a joué un rôle clé dans la désignation de la présidente de l’Assemblée nationale. La phrase peut provoquer une crise d’urticaire à n’importe quel étudiant en droit constitutionnel. Et pourtant, jeudi 18 juillet, dix-sept ministres ont participé, en tant que député·es, à la réélection de Yaël Braun-Pivet au perchoir. « Démissionnaires » mais toujours chargé·es des affaires courantes, Gabriel Attal et seize membres du gouvernement ont eu un rôle décisif dans la victoire de leur ancienne collègue, réélue avec treize voix d’avance.

Le premier ministre a pourtant failli louper le début du scrutin. En début d’après-midi, il était encore à Nice (Alpes-Maritimes) avec le ministre de l’intérieur, Gérald Darmanin, auprès des victimes du terrible incendie qui avait coûté la vie à sept personnes la veille. Un avion de l’État a permis aux deux hommes d’arriver pile à temps au Palais-Bourbon, où ils ont pris place comme simples parlementaires.



Ainsi va la vie des ministres-parlementaires, depuis le second tour des élections législatives anticipées. Depuis la démission du gouvernement Attal le 16 juillet, ses membres sont considérés comme démissionnaires, mais encore chargés des affaires courantes. Une responsabilité que cumulent avec leur mandat parlementaire le premier ministre, les deux ministres susnommés mais aussi les titulaires des portefeuilles de l’agriculture, Marc Fesneau, des affaires étrangères, Stéphane Séjourné, de l’égalité, Aurore Bergé, ou encore de la santé, Frédéric Valletoux.

Leur collègue délégué au logement, Guillaume Kasbarian, a tenté de concilier ses deux missions jeudi, lorsqu’il s’est présenté à l’Assemblée avec, sous le bras, son parapheur de ministre. En attendant de voter, le député d’Eure-et-Loir a enchaîné les signatures, sagement assis à sa table. Comme lui, les membres du gouvernement sont encore chargé·es de valider certaines nominations et certains décrets ; d’autres sont en première ligne pour l’organisation des Jeux olympiques et paralympiques ou pour la gestion des drames sécuritaires et climatiques qui ne manquent pas d’émailler chaque période estivale.

Leur situation a suscité un vif débat, tant dans la classe politique que parmi les juristes. L’article 23 de la Constitution de la Ve République souligne que « les fonctions de membre du gouvernement sont incompatibles avec l’exercice de tout mandat parlementaire ». Ancien président du Conseil constitutionnel et de l’Assemblée nationale, Jean-Louis Debré a déploré une situation « pas acceptable ». « Vous ne pouvez pas être à la fois au gouvernement et à l’Assemblée nationale, a tonné l’ancien élu de droite sur BFMTV. On est dans un régime de séparation des pouvoirs. Ce n’est pas correct. »

La cheffe de file du Rassemblement national (RN), Marine Le Pen, a aussi dénoncé « une violation de l’esprit de la Constitution », décelant « quelque chose d’éminemment gênant » dans le fait de « voir des ministres […] courir dans les couloirs de l’Assemblée pour faire voter pour eux ». Le quotidien de l’Assemblée peut donner, dans les jours et les semaines à venir, des situations baroques. Gabriel Attal va-t-il fixer l’ordre du jour des séances, comme le prévoient les textes ? Si un projet de loi doit être présenté en urgence, les dix-sept ministres-parlementaires devront-ils descendre au banc des ministres ?

À gauche, la condamnation de cette pratique a été unanime. « Il est totalement contraire à la Constitution que les ministres siègent et votent [mais] ils vont le faire », a écrit la sénatrice écologiste Mélanie Vogel sur le réseau social X. Après le scrutin, jeudi soir, Mathilde Panot a souligné « la fébrilité et la fragilité d’un pouvoir qui avait absolument besoin de ces dix-sept voix pour battre [la] candidature commune » de la gauche.

Anticonstitutionnellement
L’avocat Jean-Baptiste Soufron a écrit une tribune sur le sujet avec ses collègues de l’Association de défense des libertés constitutionnelles (Adelico). « Ce qui est en jeu, c’est la séparation des pouvoirs, lance-t-il. L’exécutif ne peut pas être au cœur du législatif : en ayant un pied dans chaque pouvoir, Gabriel Attal se place en situation de conflit d’intérêts. Il est à la fois au four et au moulin. Rappelons que c’est le gouvernement qui fixe l’ordre du jour de l’Assemblée et que c’est l’Assemblée qui peut censurer le gouvernement ! »

Professeur de droit public à l’université Paris I, Paul Cassia a saisi le Conseil d’État d’un recours contre un décret signé par Gabriel Attal le 8 juillet. Élu député la veille, « il n’avait plus compétence pour le signer », argue-t-il. « À compter de leur élection, il faut appliquer strictement le principe de séparation des pouvoirs, poursuit le juriste. Le principe de l’article 23 est clair, net et il n’appelle aucune forme d’explication. Il paraît complètement inouï que le premier ministre se place dans une situation inconstitutionnelle. »

Jean-Philippe Derosier, autre spécialiste du droit constitutionnel, a poussé une gueulante sur le plateau de France 5 mercredi. « L’article 23 est un des articles les plus clairs !, a estimé le professeur agrégé de droit public à l’université de Lille. On a toujours un gouvernement. Gabriel Attal n’est pas censé pouvoir voter [jeudi]. Ça sera contredit par les faits mais tous les jours, des chauffards roulent à 160 sur la route et ils ne sont jamais attrapés. Ça ne veut pas dire que ça devient légal pour autant. »

Conscient de l’inconfort de la situation, Gabriel Attal s’est invité jeudi au journal télévisé de TF1 pour passer un message : tout est sous contrôle. « C’est une situation qui est nécessairement temporaire, a expliqué le chef du gouvernement. Il n’y a jamais de vacance du pouvoir en France. Il y a toujours un gouvernement aux manettes pour protéger les Français. » Et le député des Hauts-de-Seine de préciser qu’il sera désormais rémunéré par l’Assemblée et non plus par l’État.

Personne n’est habilité à en juger 
Les ministres-parlementaires conservent pourtant l’apanage de leurs avantages ministériels. S’ils n’ont plus le droit, au vu de la démission du gouvernement Attal et sauf urgence, de prendre des décisions structurantes, de s’exprimer dans les médias ou de se déplacer à ce titre, les concernés conservent leurs bureaux, leur cabinet, leur voiture de fonction avec chauffeur… En plus des moyens matériels et humains alloués par le Palais-Bourbon.

En dépit des multiples critiques sur leur situation, les ministres concerné·es ne risquent pas grand-chose. Quand bien même la situation serait contraire à la Constitution, le Conseil constitutionnel s’estime incompétent pour en juger. Il l’a notamment exprimé en 1986, après que le gouvernement Rocard a démissionné pour participer à l’élection de Laurent Fabius au perchoir, avant d’être de nouveau nommé le lendemain.

Signe que le débat tracasse aussi l’exécutif, le cabinet de Gabriel Attal a convoqué les journalistes, mercredi, à une audioconférence pour répondre aux interrogations sur le sujet. « Pour trancher cette question, on se réfère à la loi organique », a expliqué Matignon, renvoyant à l’article LO153 du Code électoral, censé préciser la Constitution. « L’incompatibilité » entre les deux fonctions « ne prend pas effet si le gouvernement est démissionnaire » avant l’expiration d’un délai d’un mois à compter de la nomination au gouvernement, est-il indiqué.

 

NOTE D'YVAN BALCHOY

Personnellement, je considère que le responsable de cette falsification de la constitution a commis un acte de forfaiture.  l'histoire retiendra de ce micro-président qu'il ne mérite après son triste passage à l'Elysée qu'un poste de direction dans une banque opaque comme lui.

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