15-06-18- MACRON PRESIDENT DU MEDIOCENTRE OU PLUTÔT DE LA MEDIOCRATIE (INVESTIG'ACTION)
Réformateur, pragmatique et efficace, il est “l’homme que nous attendions”, nous laissent entendre des responsables des grands médias. Intellectuellement, il fut très proche du philosophe Paul Ricoeur, nous rabâchent ses admirateurs. Dès 2014, Attali annonçait : » Macron sera président en 2017″, « Nous avons élu un oiseau très rare ! » nous dit Kouchner. » Il a résisté pendant quelques secondes à la poignée de main Donald Trump » commente Christophe Barbier. “L’échange est ferme, viril mais correct, et hisse la France au niveau de l’Amérique » garantit l’éditocratie. « Macron c’est moi, en mieux » certifie Sarkozy. « Il est mi-Kennedy, mi-Alcibiade » écrit BHL toujours bien inspiré (Alcibiade fut condamné à l’exil et Kennedy mourut assassiné).
Pour Alain Minc, “Macron, c’est Bonaparte Premier consul”.
Alain Juppé « partage en grande partie » la vision d’Emmanuel Macron.
Valéry Giscard d’Estaing “distribue des bons points” à Macron.
Bref, cet échantillon de louanges dithyrambiques indique à quel point Emmanuel Macron est le modèle d’une très grande partie de la classe politico-médiatique. N’ayons pas peur des mots, Emmanuel Macron fait consensus auprès des oligarques.
Dans le même style, le gouvernement Macron prétend vouloir déconstruire la désinformation et les théories conspirationnistes. Et simultanément la famille Macron entretient une relation fusionnelle avec Philippe de Villiers qui est pourtant l’archétype du porte-parole au style paranoïaque selon les critères définis par l’historien américain Richard Hofstadter, lorsqu’il établit le portrait robot du théoricien de la conspiration à partir de postulats caractéristiques. Ces postulats nous les retrouvons dans les livres de Philippe De Villiers. Pour lui :
La conspiration dure depuis plusieurs décennies
Il y a allégeance à une puissance étrangère (le monde arabe)
La France sacrifie ses valeurs
Les arabes imposent leur langue et leur religion
L’alliance France-monde arabe s’appuie sur une politique commune hostile à la chrétienté
Il y a complicité des instances dirigeantes française
Il y a complicité des médias
L’idéologie islamique imprègne les institutions scolaires et universitaires.
D’un autre côté Macron entretient des relations étroites avec Daniel Cohn-Bendit et Romain Goupil, deux figures du libéralisme libertaire qui se proclament foncièrement européistes. S’il y a autant de contradictions en médiocratie, c’est tout bonnement parce que l’extrême centre est avant tout la sphère des faire-valoir et des faux-semblants. C’est ainsi que Nicolas Hulot a été nommé ministre de la Transition écologique et solidaire par Emmanuel Macron, alors que ce dernier multiplie les camouflets à l’encontre de son ministre et souhaite même rétablir les chasses présidentielles ?… Il va de soi que cet héritage de la monarchie se pratique uniquement entre pairs.
Nous avons sélectionné quelques citations emblématiques du Président Macron. Parmi les constantes figure en premier lieu la certitude pour lui d’être un homme d’exception. D’autre part, Emmanuel Macron à une fâcheuse tendance à perdre son sang froid dès qu’il est contrarié. Ajoutons que notre Président méprise totalement les classes populaires. Enfin, autre point inquiétant, Emmanuel Macron ne cesse de se contredire et, peut-être pire encore, il semble prendre ses croyances pour des vérités absolues. Voyons cela plus en détails.
« Je ne suis que l’émanation du goût du peuple français pour le romanesque »
« Aujourd’hui, je ne suis pas prêt à faire les concessions que m’impose le Parti socialiste, c’est-à-dire m’excuser d’être un jeune mâle blanc diplômé. En d’autres temps, c’était un avantage compétitif inouï. Un jeune mâle blanc inspecteur des finances, il y a soixante ans, était le maître du monde »
« Dans la politique française, cet absent est la figure du roi, dont je pense fondamentalement que le peuple français n’a pas voulu la mort »
« Je mise sur la révolution démocratique«
« Il faut des jeunes Français qui aient envie de devenir milliardaires »
« Il aurait fallu une Margaret Thatcher à la France »
”Fillon, c’est Thatcher dans les années 80, la France mérite mieux que ça”
« Je n’ai pas de leçons à recevoir.»
«Le meilleur moyen de se payer un costard, c’est de travailler »
« Le libéralisme c’est la loi du plus fort, l’esprit des réformes que nous proposons c’est tout l’inverse »
« Le libéralisme est une valeur de gauche«
« Je suis maoïste, […] un bon programme c’est ce qui marche »
« La politique c’est mystique »
« Quand t’es jeune, 35h c’est de la pipe »
« Travailler plus, sans être payé plus »
« Monsieur Trump” ou « l’Américain »: “N’oubliez jamais que si vous êtes une nation libre, c’est parce que des ambitieux sont partis de ces terres avec l’amour de la liberté, avec le même rêve, le rêve français, le rêve européen. Monsieur Trump, n’oubliez jamais ce que vous nous devez. La liberté, votre existence, c’est celle de Lafayette, c’est la nôtre »
« Avec Trump, nous contribuerons à la création d’un ordre mondial du 21e siècle pour le bien de nos concitoyens »
« Il y a dans cette société (Gad), une majorité de femmes, il y en a qui sont pour beaucoup illettrées, pour beaucoup on leur explique: Vous n’avez plus d’avenir à Gad ou aux alentours. Allez travailler à 50 ou 60 km! Ces gens-là n’ont pas le permis de conduire, on va leur dire quoi ? »
« Si j’étais chômeur, je n’attendrais pas tout de l’autre, j’essaierais de me battre d’abord »
« Mes prédécesseurs n’avaient absolument aucune idée pour l’Europe »
« J’ai une loyauté personnelle envers François Hollande. Je lui dois de m’avoir fait confiance et de m’avoir nommé au gouvernement. En même temps, lorsqu’un président nomme quelqu’un ministre, il le fait parce qu’il pense que c’est bon pour son pays, pas pour en faire son obligé »
« François Hollande, sa présidence bavarde et son “absence d’idée” sur l’Europe »
« Comme De Gaulle, je choisis le meilleur de la gauche, le meilleur de la droite et même le meilleur du centre »
« Je suis l’anti-système«
« J’ai condamné toujours la colonisation comme un acte de barbarie. […] La colonisation fait partie de l’histoire française. C’est un crime contre l’humanité. Ça fait partie de ce passé que nous devons regarder en face en présentant aussi nos excuses à l’égard de celles et ceux envers lesquels nous avons commis ces gestes »
« En même temps, il ne faut pas balayer tout ce passé et je ne regrette pas cela parce que – il y a une jolie formule qui vaut pour l’Algérie – la France a installé les droits de l’homme en Algérie, simplement elle a oublié de les lire. […] Tout en reconnaissant ce crime, je ne veux pas qu’on tombe dans la culture de la culpabilisation sur laquelle on ne construit rien »
« Une gare, c’est un lieu où on croise les gens qui réussissent et les gens qui ne sont rien, parce que c’est un lieu où on passe, un lieu que l’on partage »
Difficile, au milieu de tant d’inconséquence, de comprendre comment Macron a pu séduire autant de français. Le philosophe Alain Deneault montre qu’Emmanuel Macron, à l’instar de Justin Trudeau, premier ministre du Canada depuis novembre 2015, est devenu une figure charismatique uniquement parce que des médias complaisants lui attribuent plus de qualités qu’il n’en a réellement.
Une figure de proue de l’extrême centre…
Alain Deneault définit l’extrême centre comme un nouvel ordre politique qui s’efforce de liquider les notions de droite et de gauche. Cette nouvelle droite, puisque nous allons voir qu’il s’agit bien de cela, s’applique selon lui à garantir plus d’argent pour les multinationales, plus de dividendes versés aux actionnaires, plus de facilité d’accès aux paradis fiscaux, moins de services sociaux, et le démantèlement des droits des travailleurs.
“Emmanuel Macron, c’est Robin des bois à l’envers : il prend aux pauvres pour donner aux riches” a déclaré le journaliste François Ruffin. Et au vu du bilan de sa première année de présidence, il semble difficile de lui donner tort :
Suppression de l’impôt sur la fortune (ISF) dès 2017
Suppression de l’impôt pour freiner l’exil fiscal (exit tax) pour 2019
Suppressions de 120 000 postes de fonctionnaires
Gel du point d’indice et rétablissement du jour de carence pour les fonctionnaires
Diminution des aides au logement
Hausse de la CSG
Stigmatisation des chômeurs
… pour ne retenir que quelques mesures.
Il n’y a rien de nouveau sous le soleil, serait-on tenté de dire, puisque l’économiste libéral Milton Friedman soutenait qu’une entreprise ne devrait pas avoir de « responsabilité sociale » envers le public ou la société. Pour Friedman, le seul souci qui doit peser sur l’entreprise est d’accroître les profits pour ses actionnaires ainsi que pour elle-même. Pour les tenants de la doctrine Friedman, en particulier Reagan, Thatcher et Pinochet, la question sociale doit être subordonnée au bon vouloir de l’initiative privée. Une théorie très fortement contestée par la journaliste Naomie Klein qui démontre que la plupart des citoyens s’appauvrissent tandis que les élites corporatives gagnent une énorme richesse. En janvier 2018, l’ONG Oxfam International rapportait dans un rapport consacré à l’année 2017 que les 1% les plus riches ont empoché 82 % des richesses créées cette année-là, tandis que la moitié la plus pauvre de l’humanité n’en n’a pas eu une miette.
Médiocratie : La marque de l’extrême centre
En politique selon Deneault, être médiocre signifie satisfaire une oligarchie. Aussi la médiocratie est incarnée par l’extrême centre, commente-t-il. Deneault insiste sur le fait que la « médiocrité” est en français le substantif désignant ce qui est moyen, tout comme supériorité et infériorité font état de ce qui supérieur et inférieur. Il n’y a pas de « moyenneté ». En conséquence la médiocrité désigne le stade moyen érigé au rang d’autorité.
Pour Deneault, la principale compétence d’un médiocre est de reconnaître un autre médiocre. Ensemble, ils organisent des réseaux afin d’établir un puissant système de collusions et de renvois d’ascenseurs. Dans un article précédent consacré à Emmanuel Macron, il nous était apparu important de faire la liste des groupes de pression et des réseaux très opaques du patronat qui gravitent autour de notre nouveau président.
Confus et nébuleux
« La grosse colère d’Emmanuel Macron face aux eurodéputés hostiles aux frappes en Syrie« , titra la presse sous l’influence des réseaux de l’OTAN, après que la question des preuves d’armes chimiques lors des attaques en Syrie ait été soulevée à l’Assemblée européenne. Une intervention “irresponsable, risquée et sans perspective politique”, indiquaient certains responsables politiques européens, qui notaient que Trump, May et Macron avaient agi sans preuves ni mandat de l’ONU.
Face aux eurodéputés hostiles aux frappes en Syrie, Macron s’improvisa défenseur de la veuve et de l’orphelin, et s’adressa à son opposition en ces termes : « Les mêmes, les mêmes qui à chaque fois s’indignent devant les images que nous avons vu, d’enfants, de femmes, morts d’attaques de chlore, les mêmes, restons-nous assis ? Défendons nous des droits en disant ‘les droits c’est pour nous, les principes c’est pour nous, la réalité c’est pour les autres ? Non, non ! » Le reste est tout aussi indigeste, mais surtout le Président Macron répond totalement à côté, car la seule chose qui lui fut demandée était tout simplement de fournir ses preuves. Par la suite la “médiocrasphère” viendra à la rescousse du nouveau boss : « Révisionnistes, dégueulasses, sont ceux qui réclament des preuves », affirme BHL qui sans vergogne recourt une fois encore au point Godwin (l’arme favorite des médiocres).
«Bonnet blanc, blanc bonnet»
Selon les critères définis par A. Deneault, il n’est pas vain d’établir une ressemblance entre le néo-conservatisme et l’extrême centre. Rappelons que le néo-conservatisme est une variante du conservatisme. Sa spécificité est de conserver les caractéristiques du conservatisme traditionnel qui promeut des valeurs établies issues de coutumes et de traditions. Ces règles (foncièrement opposées au progressisme) sont ainsi combinées à l’individualisme, que le néo-conservateur qualifie de libre entreprise. Sur ce point, la convergence avec le président français est établie par Forbes le magazine d’affaires américain pour qui Macron est le leader des marchés libres.
Dès qu’ils ont eu accès à des postes de pouvoir et d’autorité, les néo-conservateurs ont approuvé la totalité des programmes anti-sociaux. Pour eux, seules les initiatives privées ont pour fonction de renforcer l’action sociale, via le financement d’organisations religieuses qui ont seules la vocation à s’occuper des pauvres et des marginaux. Autant dire que chez les néocons l’aide sociale, qui repose en principe sur des actions d’insertion, de prévention et de secours, doit-être réduite à sa plus simple expression. La promotion de la philanthropie est également le leitmotiv du programme économie sociale et solidaire de La République En Marche.
Dans leur logique, l’État est relégué au rang de simple auxiliaire des conglomérats de la finance, de l’énergie et de l’armement. Moins de ressources pour les classes populaires et plus de dividendes pour les groupes financiers constituent également la ligne économique et sociale de l’extrême centre comme nous l’avons vu précédemment. La seule différence est relative à sa forme. Le plus souvent les néoconservateurs ont migré du trotskisme pour aller vers la droite. De Trotksy, les néocons ont conservé l’idée d’exportation de la révolution, qu’ils ont fait évoluer en ingérence américaine. En résumé, ils se revendiquent ouvertement à la fois pro-israéliens, anticommunistes et anti-New Deals. Ainsi pour les néocons, la réglementation en matières économiques et sociales est un échec. L’extrême centre quant à lui avance masqué. Ses objectifs profonds sont tout aussi cruels que ceux du néo-conservatisme. Mais Deneault nous signale que le médiocre de l’extrême centre est cool, jeune, nouveau, sympathique dans sa présentation. “Il faut penser printemps” prêche son illustre représentant Emmanuel Macron. Cela nous rappelle Michel Clouscard qui surnommait George Pompidou « l’oncle libéral débonnaire ».
Ne perdons pas de vue qu’avant de cautionner la politique pro-Arabie Saoudite, pro-Israël, et anti-Iran que mène Donald Trump, les poids lourds du néoconservatisme, déjà membres influents du parti républicain, avaient jeté leur dévolu sur la candidate Hillary Clinton qui reste par ailleurs une référence de l’extrême centre.
Ainsi nous comprenons pourquoi, vis à vis des crimes de guerre israéliens, l’extrême centre se situe toujours dans un semblant de consensus. Le plus souvent cela débouche sur des formules expéditives. Par exemple Macron appelle Netanyahou au « dialogue » avec les Palestiniens. Sans mentionner Israël, Trudeau a condamné « l’emploi présumé d’une force excessive et de munitions réelles » qu’il juge « inexcusable ». Mais ces annonces laconiques ne débouchent jamais sur aucune action concrète, et leurs contenus sont invariablement ponctués par des « Israël est une grande démocratie », ou encore « A Paris, Macron joue la proximité avec le premier ministre israélien ».
Le discours paradoxal
Le médiocrate de l’extrême centre peut apparaître déroutant pour son auditoire, tant ses contradictions sont nombreuses. Ainsi pour battre Donald Trump, Hillary Clinton se revendiquait féministe et engagée pour les droits des femmes, alors même que parmi les donateurs de la fondation Clinton, nous retrouvons l’Arabie Saoudite, pays qui condamne les femmes adultères à la mort par lapidation.
Conclusion : un “Président des riches”
Il n’est ni Machiavel, ni Alcibiade, ni Kennedy, ni Bonaparte. Plus modestement il est le représentant d’une droite qui n’a jamais cessé de modifier son apparence. Son objectif ? Déconstruire méthodiquement le modèle social français. Ses arguments, une fois l’emballage retiré, sont ceux qu’utilisent les différentes droites depuis des lustres : « nous sommes soumis à la concurrence internationale », « le nombre des fonctionnaires doit-être réduit », « il faut impérativement contrôler les chômeurs », « les cheminots sont des privilégiés », « nous devons insuffler un élan méritocratie » et enfin « baissons massivement les impôts des plus riches afin que la théorie du ruissellement opère ».
Il est clair que pour des raisons de convergence d’intérêts, les milliardaires qui possèdent la presse ont pour la plupart soutenu la candidature de notre nouveau président, qui dispose désormais de la quasi-totalité des moyens de communication pour promouvoir sa politique. Ce constat nous renvoie à la question centrale : Pourquoi les médiocres de l’extrême centre dépensent-ils autant d’énergie pour se déguiser ? Ne serait-il pas plus simple de déclarer : “Nous sommes avant tout au service d’une classe sociale communément appelée élite qui, puisqu’elle est élite, doit naturellement dominer” ?
Selon toute vraisemblance la réponse à ces interrogations réside dans le fait que si les médiocres et en particulier Macron, nous imposent ce jeu de dupe, c’est parce que s’ils “mettaient carte sur table”, l’oligarchie qui les emploie n’aurait pas la moindre chance de conserver ses privilèges. Rappelons nous que la médiocratie est le monde des collusions et de la corruption. De ce fait, les médiocres trahissent une idée qui comporte trois mots : “Liberté, Égalité, Fraternité”. Cette devise est en fait l’ADN de la société républicaine. Fortement influencée par Du Contrat social de Rousseau, elle postule que les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droits. Ainsi nous comprenons aisément pourquoi cet axiome qui est l’un des fondements de la morale moderne est incompatible avec l’affairisme, les réseaux, et le renvoi d’ascenseur que favorisent les médiocres de l’extrême centre.
Emmanuel Macron est la nouvelle égérie de la lignée médiocrate. La résurgence de son archaïsme ne laisse planer aucun doute sur ses véritables aspirations (de Rothschild, de Villiers, Versailles, Chambord… ). Cependant, intuitivement, la plupart des français ont désormais compris à qui ils avaient affaire : Selon le sondage du mois de mai 2018 Odoxa-Dentsu Consulting, les trois quarts des français (72%) perçoivent Emmanuel Macron comme un « président des riches ».
Source :Observatoire du néo-conservatisme
Pour lire dans son intégralité cette perçante étude sur la réalité souvent occultée du Macronisme référez-vous à INVESTIG'ACTION de Michel Collon
Yvan Balchoy