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Publié par BALCHOY

En l'imaginant dans l'obscurité si fragile, si terrifiée, Ghislain ressentit une bouffée de tendresse indicible pour cette jeune fille dont il se sentait plus que jamais responsable.

A voix basse, il l’appela :

 

 

 

            « Ma douce, ma toute belle, n’aie pas peur, réveille-toi. Rien n’est perdu encore. Ensemble, j’en suis sûr, nous allons échapper à ses bandits et demain… si tu le veux, ma mie,  nous réunirons pour toujours nos deux vies que nous aurons sauvées ensemble. »

 

 

 

Solange, le visage encore apeuré, entrouvrit les yeux et les tourna vers cette voix qui lui parlait si doucement. En reconnaissant Ghislain, une ébauche de sourire naquit sur ses lèvfres. Elle lui tendit gauchement ses deux mains enchainées comme pour s’excuser de ne pas aller au devant de lui.

            « Mon doux ami, merci ! Je ne suis pas aussi sûr que toi – pour la première fois elle le tutoyait, il en rougit de plaisir – que nous allons nous en sortir. Mais sache que de toute façon je me sens fière et honorée d’avoir un ami tel que toi et si ma vie touche ici à son terme, je la remercie de m’avoir donné en toi une ultime joie. »

 

 

 

            -« Tais-toi, Solange, avant de te connaître, je n’étais rien, rien qu’un petit bourgeois replié sur soi, égoïste à crever ; pat ton seul rayonnement en un instant tu as transformé ma vie en feu de joie. Maintenant excuse-moi, il est grand temps d’agir. Défais tes liens tandis que je me débarrasserai des miens et voyons comment nous échapper, si possible, avant que la camionnette n’arrive à destination. »

 

 

 

Il ne leur fallut que quelques minutes pour se libérer les mains d’abord seuls puis le reste de leurs liens, ensemble, dès qu’il leur fut possible de se rapprocher.

Ghislain attira Solange dans ses bras, elle l’embrassa rapidement sur la bouche mais quand le garçon chercha à prolonger cet instant de bonheur, mais, souriante, elle se déroba.

 

 

 

            -« Ghislain, si tu veux que demain nous puissions encore nous chérir, il est grand temps de voir comment nous allons nous sortir d’ici. »

 

 

 

Tous deux, en se tenant la main, rampèrent vers le hayon du véhicule et se penchèrent à la vitre arrière. Il faisait encore nuit, on devinait à peine la route presque désertique ; l’horizon commençait à rougir : dans une petite heure, il ferait jour.

            Heureusement, il n’y avait pas de regard entre les places avant où se tenaient les bandits et l’arrière du véhicule. Persuadés de la solidité des liens qui immobilisaient les deux jeunes gens ainsi que de l’engourdissement causé par le chloroforme, les gredins avaient abandonné toute surveillance.

 

 

 

            Il fallait en profiter.  La plage arrière où ils étaient confinés était plongée dans l’obscurité quasi-totale : aussi est-ce en tâtonnant qu’ils l’inspectèrent dans l’espoir de trouver un objet susceptible de favoriser leur fuite.

            Plus d’une fois, au lieu du marteau ou du casse-vitres espéré, ils se touchèrent mutuellement, la main de Ghislain se posant sur le nez de la jeune femme, celle de Solange se refermant fermement sur un des souliers du garçon. Et ce ne fut pas rien de refreiner l’irrésistible envie de fou-rire qui les secouait malgré le tragique de la situation.

            Rien, hélas rien ! Le sol et les parois de leur prison étaient désespérément nus.

           

 

 

 

Pourtant, unis par cette tendresse mutuelle qui à chaque instant se faisait plus forte ils ne se résignaient nullement à mourir ; mieux, la certitude que leur amour serait le plus fort s’imposait à eux au fur et à mesure que le véhicule approchait pourtant du lieu prévu pour leur exécution.

           

            Et même temps que le jour, le brouillard se levait peu à peu par nappes éparses et gommait ça et là un paysage de plus en plus désolé.

            Quand on y voyait entre deux zones de purée de pois, ils percevaient des arbres, souvent des arbustes plutôt rares. A part une fermette quelque peu délabrée, aucune trace humaine. Des deux côtés de la route, des marécages couverts d’une maigre végétation à  perte de vue, une vision quelque peu apocalyptique.

            Cette fois encore, ce fut Solange qui eut l’intuition décisive.

 

 

 

            -« Ghislain, ils nous pensent paralysés au sol. Il nous faut faire jouer l’effet de surprise. »

 

 

 

            -« Comment veux-tu, ils sont peut-être armés et nous n’avons que nos mains pour nous défendre : aucune chance de leur échapper ! »

 

 

 

            « Oui, en un sens tu as raison, inutile de nous battre avec eux ; Mais ne crois-tu pas que si nous réussissons à les bousculer au moment où ils ouvriront le hayon, nous aurons une petite chance de filer à leur barbe.

 

 

 

           

Yvan Balchoy

balchoy@belgacom.net

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