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Publié par YVAN BALCHOY

19-04-24- ECOEUREMENT DES ETUDIANTS APRES L'INTERDICTION D'UNE CONFERENCE DE LF1 (MATTHIEU DEJEAN-MEDIAPART)

https://www.mediapart.fr/journal/politique/190424/lille-l-ecoeurement-des-etudiants-apres-l-interdiction-d-une-conference-de-lfi


À Lille, l’écœurement des étudiants après l’interdiction d’une conférence de LFI
Le choc des étudiants lillois après l’annulation d’une conférence de Jean-Luc Mélenchon et Rima Hassan sur la Palestine a été décuplé par l’interdiction consécutive de la préfecture. Beaucoup dénoncent « un climat répressif » sur les soutiens à Gaza qui n’épargne pas les universités.

Mathieu Dejean

19 avril 2024 à 09h52

 
 
Lille (Nord).– Quatre étudiants en sciences politiques âgés de 19 ans ont une discussion animée, le 18 avril en milieu d’après-midi dans le quartier de Moulins à Lille. Le noyau dur de l’association Libre Palestine, qui a organisé une conférence de Jean-Luc Mélenchon et de Rima Hassan, annulée par l’université de Lille, est sous pression – raison pour laquelle ses membres préfèrent garder l’anonymat.

En meeting à Roubaix la veille, Jean-Luc Mélenchon avait décrit le président de l’association « prostré à l’idée qu’on ait pu le prendre pour quelqu’un d’autre que la personne qu’il est ». Le jeune homme à la mine grave donne le change, mais il jette des regards inquiets autour de lui.

Depuis plusieurs jours, une polémique alimentée par des élu·es macronistes, Les Républicains (LR) et du Rassemblement national (RN) a enflé, accusant Libre Palestine de propager l’antisémitisme. Les quatre ami·es ont passé des heures devant CNews, qui s’est repaît de l’affaire avec son outrance habituelle, et sur le réseau social X, où le syndicat étudiant d’extrême droite UNI a revendiqué une « victoire » une fois l’annulation obtenue.

« L’ampleur que ça a pris nous a totalement dépassés. On ne compte plus les propos diffamatoires tenus à notre propos », disent-ils à l’unisson, rejetant formellement l’accusation qui leur est faite de « nier l’État d’Israël » du fait de leur logo – une carte de la région israélo-palestinienne, similaire à celle de l’Union des étudiants juifs de France (UEJF), arguent les Insoumis.

Illustration 1Agrandir l’image : Illustration 1
Devant l'université de Lille, le 18 avril 2024. © Photo Mathieu Dejean / Mediapart
Autour d’eux, rue d’Arras, des policiers au brassard orange vont et viennent en les ignorant pendant que leurs collègues scotchent un arrêté de la préfecture du Nord sur les portes de L’Impérial, la salle voisine de la permanence du député La France insoumise (LFI) Adrien Quatennens, qui devait accueillir la conférence après son annulation.

L’information est tombée quelques instants plus tôt : le préfet du Nord interdit par cet arrêté la conférence déjà déplacée. Il invoque des « risques de trouble à l’ordre public en raison des appels à la mobilisation lancés par plusieurs organisations pouvant entraîner des rassemblements, des attroupements et des heurts sur la voie publique, dans un climat de tensions géopolitiques accrues ».

Alors que LFI avait tenté de garder le lieu secret, la fachosphère s’est emparée du lien d’inscription à l’événement et des anonymes se sont enregistrés en masse en écrivant des insultes à la place de leurs noms. Pas de quoi effrayer les Insoumis, « à la maison » dans le quartier ouvrier de Lille-Moulins. Mais le préfet a tranché. Les quatre militant·es associatifs, dépités, iront donc au rassemblement auquel LFI appelle désormais en fin de journée sur la place Vanhoenacker, tout près d’ici, mais ils s’y feront discrets. « Demain, on a partiels, on ne veut pas finir en garde à vue ! », sourient-ils tristement.

Des craintes d’une « dérive liberticide »
Devant la permanence parlementaire d’Adrien Quatennens, les militant·es LFI courbent l’échine, mais ils sont eux aussi sous le choc. Depuis hier, ils tombent de Charybde en Scylla et ne savent plus à quoi se raccrocher pour avoir l’assurance qu’une simple conférence sur la Palestine ait bien lieu.

Emma Fourreau, coresponsable des Jeunes Insoumis et candidate sur la liste conduite par Manon Aubry, a déjà vécu l’annulation d’une conférence à laquelle elle devait participer avec Jean-Luc Mélenchon à l’université de Rennes la semaine précédente. La préfecture d’Ille-et-Vilaine l’avait annulée à cause d’une alerte attentat qui laisse la militante sceptique. Au total, les Insoumis dénombrent cinq annulations de conférences – un effet concret des accusations dont ils doivent se défendre en permanence depuis le 7 octobre.

La répétition du même scénario est, aux yeux d’Emma Fourreau, le symptôme d’une « dérive liberticide ». « La possibilité même de pouvoir s’exprimer librement en tant que force politique d’opposition est attaquée. Il ne faut pas laisser ce précédent s’installer, ce serait délétère pour toutes les forces qui ne seraient pas de la même obédience que Macron », déclare-t-elle.

Elle dénonce aussi une instrumentalisation de la lutte contre l’antisémitisme pour étouffer la voix de LFI sur la Palestine : « Je ne crois pas une seule seconde que nos opposants nous croient antisémites, il n’y a jamais eu le moindre propos antisémite de Jean-Luc Mélenchon ou de nos porte-parole. Ce qui est en cause c’est la parole qu’on porte sur la Palestine, l’impératif du cessez-le-feu et de la justice pour le peuple palestinien. »

Toute la journée, c’est au nom de cette cause et de la défense des libertés publiques que des étudiant·es membres d’organisations syndicales et politiques pas forcément alignées avec LFI se sont évertués à faire connaître cette « censure ».

À 15 heures, ils étaient une cinquantaine à donner de la voix au mégaphone devant le siège de l’université de Lille à l’appel de Solidaires étudiant·es, de l’Union étudiante, de la Fédération syndicale étudiante (FSE), de l’Unef ou encore du Nouveau Parti anticapitaliste (NPA). L’interdiction de la préfecture du Nord les a un peu plus abasourdis. « Je ne m’y attendais pas, témoigne Arthur Pedeboscq, 19 ans, étudiant à Lille-II et militant aux Jeunes Insoumis. Que la parole des opposants à un régime génocidaire soit interdite est une atteinte grave à la démocratie, ça marque une rupture. »

« L’argument de la montée des tensions internationales est absurde : ça fait 6 mois qu’il y a un massacre sans nom à Gaza !, abonde Hugo, 22 ans, militant au NPA, en référence au communiqué du président de l’université. La fac, en interdisant cette conférence, cède à la censure et cautionne le discours qui assimile la défense de la Palestine à de l’antisémitisme. »

Tous les étudiant·es que nous avons interrogés rapportent un décalage entre la violence de ces accusations et le climat plutôt pacifique sur le campus lillois. Depuis le 7 octobre, deux comités de soutien à la Palestine se sont constitués et tiennent régulièrement des tables derrière un grand drapeau palestinien.

Léonore, responsable de la FSE Lille, rapporte que plusieurs événements liés au risque de génocide à Gaza n’ont causé ni troubles ni émois, même si l’université veille à prévenir tout débordement – dont une conférence de la juriste franco-palestinienne Rima Hassan il y a un mois, le jour où sa candidature aux européennes était annoncée.

« Tout s’était très bien passé malgré les insultes de l’UNI à son égard sur les réseaux sociaux », témoigne Noa Massy, militant aux Jeunes Insoumis, qui insiste sur la crainte permanente du doxing de l’extrême droite – la publication sur les réseaux sociaux des coordonnées personnelles de militants et militantes soutenant la Palestine en incitant au harcèlement.

La solidarité avec La France insoumise
Albane, étudiante en master de théâtre et secrétaire fédérale de Solidaires étudiant·es, estime donc comme beaucoup de ses camarades que cette interdiction marque un nouveau cap franchi dans la répression aux soutiens de la Palestine, dans la lignée de la condamnation le même jour du secrétaire général de la CGT du Nord ou de l’enquête préliminaire qui vise des militants syndicaux de l’École des hautes études en sciences sociales (EHESS) pour « apologie du terrorisme ».

TEXTE INTEGRAL SUR LE SITE DE MEDIAPART

NOTE D'YVAN BALCHOY

Malgré la critique justifiée de cette interdiction qui vise en réalité la liberté d'expression et qui relève peut-être d'un dirigeant de région intolérant et d'une administration défaillante, cette interdiction sonne  le glas d'une certaine démocratie française. (YB)

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