02-04-24- JE NE SUIS PAS RACISTE, MAIS ...
Ce matin interview d'un cinéaste "Bonvoisin" auteur, qui porte bien son nom, semble-t-il, à propos si j'ai bien compris d'un livre: "Chaque homme a la capacité d'être bourreau ou son complice" que je compléterais bien par cet autre :"Chaque homme s'il est sincère doit reconnaître qu'il n'est pas totalement exempt du racisme" et je me méfie pour ma part de tous ceux qui vous affirment l'air innocent : "Je ne suis pas raciste pour un sou, mais"
Croyez-moi l'important de leurs propos n'est pas dans ce qui précède ce "MAIS", plutôt dans ce qui le suit. Une anecdote à ce sujet qui m'est arrivée, il y a bien des années expliquera mieux ce que je viens d'écrire. J'ai appris à détester intellectuellement le racisme à partir du vécu de mes parents et sans doute des convictions chrétiennes qu'ils m'ont léguées. Seulement le jour où j'ai appris qu'un couple mixte algéro-belge avait acheté la maison voisine de la mienne, une sorte d'angoisse sourde et mal vécue me tenailla. Et si ce couple, futur famille très nombreuse pour sûr, allait se révéler bruyant, agité et intolérant, comme on en citait mille exemples dans la presse chaque jour. Et bien j'avais faux sur toute la ligne; ce couple n'a eu qu'une fille et est un modèle de tranquilité publique. Le mari de ma voisine est certes musulman mais surtout un exemple d'une grande tolérance dans le vécu quotidien et bien plus encore comme cette anecdote va le démontrer :
Je n'oublierai jamais ce jour où je dus me rendre pour un deuil dans la famille de ma femme en Saône et Loire. J'avais à ce moment-là deux petits enfants en bas âge et nous avons demandé à ce couple voisin s'il pouvait les garder le jour de l'enterrement. Ce fut tout de suite "oui" sans hésitation ni condition. Une heure plus tard, ce voisin ami vint sonner à ma porte. Allait-il se raviser? Bien au contraire ! Je me rappelle encore ces mots qui me bouleversent toujours. Tu as me dit-il une "deux chevaux", c'est pas rapide pour un aller retour en Saône et Loire sur une journée, j'ai une BMW bien plus rapide, si tu le veux je vais te conduire, nous serons de retour plus vite après la cérémonie. Ainsi tandis que ma voisine s'occuppait de mes enfants, son mari nous conduisit à Cuisery. Un tel service, je ne l'aurais demandé à personne, pas même à un frère ou à une soeur, je ne l'aurais pas même imaginé ! Devinez combien alors en mon fors intérieur j'eus honte de mes craintes passées.
Pour être complet, je veux toutefois vous raconter une autre aventure arrivée à ce voisin, fait très révélateur du racisme latent qui sévit en notre pays. Un jour, on vola sa voiture, je rappelle, une BMW, il alla se plaindre à la police ou à la gendarmerie où, s'étonnant de la possibité pour un ouvrier belgo-algérien d'avoir une telle voiture, on lui fit mille misères pour enregistrer sa plainte, le soupçonnant même à demis-mots d'un vol "arrangé". Je suis convaincu que ceux qui se défiaient de lui ne se croyaient sans doute pas racistes, mais leur attitude l'était et je crois qu'un ouvrier de souche belge aurait eu moins d'ennuis en de mêmes circonstances. Cette édifiante histoire m'a éloigné de l'idée du cinéaste d'où je suis parti, même si elle n'en n'est pas si étrangère. Demain je tenterai de vous commenter plus explicitement ses propos. Je me ferai peut-être des ennemis mais il en va de ma conception de la justice et du respect des héros et des victimes d'hier ou d'aujourd'hui, je ne me déroberai pas.
Yvan Balchoy