13-04-24- MEURTRE SANS CHATIMENT (YVAN BALCHOY)
AUX VICTIMES DE TOUTES LES BAVURES POLICIERES OU AUTRES
Dans la café international,
Je t'ai expliqué le visage tout pâle
et par la colère désarçonné "
La gendarmerie vient d'assassiner
un jeune dans un quartier immigré. "
" Il était sûrement basané
venait d'un pays de disette,
et s'appelait sans doute Mahomet "
m'as tu répondu d'un air las
et j'ai compris à ce moment-là
combien tu en avais marre
de ce perpétuel cauchemar
qui est le quotidien
de ceux qui ont pour simple tort,
d'avoir un mauvais passeport
une mine exotique
une étrange génétique
qui en font les suspect parfaits
de tant de méfaits
pour une police
trop souvent pourrie
sans parler de la gendarmerie
qui associe l'étranger
à une menace de danger.
Prenant alors mon volant
il me vint en roulant
l'envie d'aller vérifier sur place comment les habitants
souvent musulmans
de ces quartiers délabrés
en qui la radio
qui n'en n'est pas à son premier ragot
ne voit souvent qu'une populace,
aussi inculte qu'illettrée,
réagissent à la mort d'un de leurs fils,
victime d'une certaine justice
impitoyable pour les petits délits,
aveugle quand il s'agit des nantis.
Me voici chaussée de Mons,
tout est calme, aucun coup de semonce,
pas même un procès verbal.
Je me demande si je n'ai pas été abusé
par une fausse publicité
Je vire à gauche,
quelle métamorphose
Brusquement une mer de flashs
jouant à cache-cache
me gomme la nuit
c'est la terreur qui luit
Une dizaine de camionnettes noires
avec leur gyrophares assommoirs
entourés d'une centaines de silhouettes
vêtues d'odieuses et sombres salopettes
mélange de verre et d'acier imbécile
et tout autour une multitude fragile :
jeunes garçons en train de gesticuler
jeunes femmes parfois voilées,
vieillards en djellaba,
foule blessée et solidaire
d'où jaillit le brouhabas d'un peuple en colère
pleurant un garçon lâchement abattu
au nom de je ne sais quel sous-entendu
aussi pitoyable que minable
et révolté par sa fin inacceptable.
Devant moi, presque joyeux
un gendarme et une gendarmette
au pied de leur camionnette
se congratulent l'air heureux
imperméables à cette souffrance
à ce flot de désespérance
qui les entoure à peine menaçante.
Leur spectacle me dégoûte
et c'est avec peine que je poursuis ma route
suivant deux autopompes
étranges mastodontes
progressant en doublet
qui tel un gigantesque ballet
repousse une foule
que je devine révoltée et mutine.
Tout le long des rues débarrassées des intrus
des habitants du quartiers
commentent d'un air attristé
a mort d'un des leurs
un ce ceux qu'on appelle parfois " beurs ".
Ils me content dans le menu détail
leur exaspération d'être traités comme bétail
humiliés avec application par le même agent
aussi obstiné que diligent
qui n'hésite pas à leur réclamer
avec autorité
jusqu'à trois fois par jour
leur carte d'identité
ou leur permis de séjour,
trop heureux de les appréhender
si d'aventure exaspérés,
ils finissent par se révolter.
Près de ces simples gens
qui me parlent doucement
ou me regardent tristement,
je me sens tout en sécurité,
alors que tout à l'heure,
devant les képis
des forces d'un ordre
si souvent créateur de désordre
je me sentais en terrain ennemi.
Alors, brusquement je me rappelle
la manifestation des jeunes "rebelles"
en hommage aux victimes de la répression
et j'invite mes frères et soeurs immigrés
si souvent dénigrés
même s'ils partagent ma nationalité
à se joindre à notre marche
afin qu'elle devienne une commune démarche
du peuple tout entier
décidé à défier
ceux qui ne cessent de le berner
ou de l'humilier.
Mon message est bien reçu
et tout aussi vite diffus
grâce à ces jeunes qui discrètement le propagent
dans leur proche voisinage.
Plus tard que ce fut lassant de retrouver mon chemin
dans ce chaos inhumain
Heureusement de jeunes passants
m'aidèrent à éviter les nombreux barrages
qui bloquaient tout passage
vers le reste de la ville
restée apparemment docile
qu'il fallait à tout prix isoler
de tous ces "émeutiers"
"emprisonnés dans leur quartier.
Mais en retrouvant à la gare du Midi
le calme d'une ville presque endormie,
je m'en retournai le cœur affermi
décidé plus que jamais à lutter
désormais pour que soit aussi rendu justice
aux victimes des polices
et avec tous les laissés pour compte
rejetés par les autopompes
d'oeuvrer pour une autre société
dont sera bannie l'exploitation
grâce à la solidarité
qui naîtra de la Révolution.
à Nadia
Ce poème ne fait que relater ma soirée du 28 février 1998 à Bruxelles.
Yvan Balchoy
yvanbal choy13@gmail.com
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