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Publié par YVAN BALCHOY

https://investigaction.net/un-reportage-du-new-york-times-demolit-le-discours-de-la-guerre-non-Un reportage du New York Times démolit le discours de la «guerre non provoquée» en Ukraine
PATRICK MARTIN28 FÉVRIER 2024
Pour ceux qui en douteraient encore. L’intérêt n’est pas tant la « révélation » en elle-même que l’Ukraine était transformée depuis 2014 en tête de pont pour des opérations contre Moscou, que le fait même que le New-York Times le reconnaissent maintenant platement.  Le Times cherche à faire pression sur les républicains pour qu'ils soutiennent le financement de la guerre. Il affirme que cet argent ne va pas à un gouvernement étranger, dans une guerre étrangère, à des milliers de kilomètres des frontières américaines, mais à un sous-traitant de l'impérialisme américain, menant une guerre américaine dans laquelle du personnel américain est intensément et directement engagé. Ce faisant, le Times a révélé que sa propre couverture de la guerre en Ukraine au cours des deux dernières années n'était rien d'autre que de la propagande de guerre, visant à utiliser un récit frauduleux pour inciter le public américain à soutenir une guerre d'agression impérialiste prédatrice dont le but est de soumettre et démanteler la Russie.
Au cours des deux dernières années, presque toutes les références des médias américains à l’invasion de l’Ukraine par la Russie en février 2022 ont été obligatoirement précédées des mots : «non provoquée».

On a dit au public qu’il s’agissait d’une guerre sans cause, que l’Ukraine était irréprochable et que l’invasion devait s’expliquer entièrement par les intentions et la psychologie d’un seul homme, le président russe Vladimir Poutine.

Cependant, le week-end du deuxième anniversaire de la guerre, le New York Times a publié un long article révélant que l’invasion russe de l’Ukraine, le 24 février 2022, avait été déclenchée par une campagne systématique et généralisée d’agression militaire et d’espionnage de la part des États-Unis.

L’article détaille les opérations de longue date de la Central Intelligence Agency (CIA) en Ukraine, au cours desquelles l’agence a financé et développé l’agence de renseignement militaire ukrainienne HUR, l’utilisant comme une arme d’espionnage, d’assassinat et de provocation dirigée contre la Russie pendant plus d’une décennie.

Le Times écrit :

Vers la fin de l’année 2021, selon un haut fonctionnaire européen, M. Poutine considérait le lancement son invasion à grande échelle lorsqu’il a rencontré le chef de l’un des principaux services d’espionnage russes, qui lui a dit que la CIA et le MI6 britannique contrôlaient l’Ukraine et la transformaient en tête de pont pour des opérations contre Moscou.

Le reportage du Times démontre que cette évaluation des services de renseignement russes était tout à fait exacte. Pendant plus d’une décennie, depuis 2014, la CIA a constitué, formé et armé les services de renseignement et les forces paramilitaires ukrainiens qui se livraient à des assassinats et à d’autres provocations contre les forces pro-russes dans l’est de l’Ukraine, contre les forces russes en Crimée et de l’autre côté de la frontière, en Russie même.

Dans un passage crucial, le Times écrit :

Alors que le partenariat se renforçait après 2016, les Ukrainiens se sont impatientés face à ce qu’ils considéraient comme une prudence excessive de la part de Washington, et ont commencé à organiser des assassinats et d’autres opérations meurtrières, en violation des conditions que la Maison-Blanche pensait que les Ukrainiens avaient acceptées. Furieux, les responsables de Washington ont menacé de mettre fin à leur soutien, mais ils ne l’ont jamais fait.

En d’autres termes, les forces paramilitaires ukrainiennes armées, financées et dirigées par les États-Unis et l’OTAN assassinaient systématiquement les forces favorables à un rapprochement avec la Russie.

Le compte-rendu du journal commence par le coup d’État de Maïdan de février 2014, lorsque des forces de droite et néonazies soutenues par les États-Unis et l’Union européenne ont renversé le président pro-russe élu et mis en place un régime pro-impérialiste dirigé par le milliardaire Petro Porochenko.

Ce coup d’État était le point culminant de deux décennies d’avancées impérialistes dans l’ancien bloc soviétique, y compris l’expansion de l’OTAN pour inclure pratiquement toute l’Europe de l’Est, en violation des promesses faites aux dirigeants de l’ancienne Union soviétique. Le Times ne dit rien de cette histoire antérieure, ni du rôle de la CIA dans les événements de Maïdan.


Ukraine: autopsie d’un coup d’Etat (Euromaïdan 2014)
AHMED BENSAADA8 MARS 2014
Maïdan a ouvert la voie à une escalade massive de l’intervention de la CIA, comme l’explique en détail le reportage du Times. L’agence de renseignement a joué un rôle central dans l’alimentation du conflit entre l’Ukraine et la Russie, d’abord sous la forme d’une guerre de bas niveau contre les séparatistes pro-russes dans l’est de l’Ukraine, puis d’une guerre à grande échelle après l’invasion russe en février 2022. Trois administrations américaines ont été impliquées : d’abord Obama, puis Trump et maintenant Biden.

Selon le reportage du Times, les opérations de la CIA comprenaient non seulement l’espionnage à grande échelle, mais aussi l’aide à des provocations directes telles que l’assassinat d’hommes politiques pro-russes dans l’est de l’Ukraine et des attaques paramilitaires contre les forces russes en Crimée.

Le Times rapporte qu’une unité ukrainienne, Fifth Directorate, a été chargée de mener des assassinats, dont un en 2016. Le Times écrit :

Une mystérieuse explosion dans la ville de Donetsk, occupée par la Russie, dans l’est de l’Ukraine, a éventré un ascenseur dans lequel se trouvait un haut commandant séparatiste russe, Arsen Pavlov, connu sous son nom de guerre, Motorola.

La C.I.A. a rapidement appris que les assassins étaient des membres du Fifth Directorate, le groupe d’espionnage qui recevait la formation de la C.I.A. L’agence ukrainienne de renseignement intérieur avait même distribué des écussons commémoratifs aux personnes impliquées, chaque écusson étant surpiqué du mot «Lift», terme britannique désignant un ascenseur.

Le reportage décrit une autre opération de ce type :

Une équipe d’agents ukrainiens a installé un lance-roquettes, dans un bâtiment des territoires occupés. Il se trouvait juste en face du bureau d’un commandant rebelle nommé Mikhail Tolstykh, plus connu sous le nom de Givi. À l’aide d’un déclencheur à distance, ils ont tiré le lance-roquettes dès que Givi est entré dans son bureau, le tuant, selon des responsables américains et ukrainiens.

Depuis le début de la guerre, le HUR ukrainien a étendu ces opérations d’assassinat à l’ensemble du territoire de la Russie, y compris l’assassinat de Daria Douguina, polémiste pro-Poutine de premier plan dans les médias russes, et de représentants du gouvernement et de l’armée russes.

La CIA a trouvé ses alliés ukrainiens très utiles pour collecter de grandes quantités de données sur les activités militaires et de renseignement russes, à tel point que le HUR lui-même ne pouvait pas les traiter et devait transmettre les données brutes au siège de la CIA à Langley, en Virginie, pour analyse. Un reportage antérieur moins détaillé sur cette collaboration en matière de renseignement, publié dans le Washington Post, citait l’estimation d’un responsable ukrainien du renseignement selon laquelle «250.000 à 300.000» messages militaires/de renseignement russes étaient collectés chaque jour. Ces données ne concernaient pas seulement l’Ukraine, mais l’activité des services de renseignement russes dans le monde entier.

Bien avant l’invasion russe, la CIA cherchait à élargir son attaque contre Moscou. C’est ce que rapporte le Times :

La relation [avec le HUR ukrainien] a été si fructueuse que la C.I.A. a voulu la reproduire avec d’autres services de renseignement européens qui partageaient le même objectif de lutte contre la Russie.

Le chef de Russia House, le département de la CIA chargé de superviser les opérations contre la Russie, a organisé une réunion secrète à La Haye. Des représentants de la C.I.A., du MI6 britannique, du HUR, du service néerlandais (un allié essentiel en matière de renseignement) et d’autres agences ont convenu de commencer à mettre en commun un plus grand nombre de leurs renseignements sur la Russie.

Une coalition secrète contre la Russie avait été établie, et les Ukrainiens en étaient des membres essentiels.

Toutes ces activités ont eu lieu bien avant l’invasion russe de février 2022. Le déclenchement d’une guerre à grande échelle a conduit à un engagement encore plus direct de la CIA en Ukraine. Les agents de la CIA étaient les seuls Américains à ne pas faire partie de l’évacuation initiale du personnel du gouvernement américain de l’Ukraine, et à n’être transférés que dans l’ouest de l’Ukraine. Ils ont continuellement informé les Ukrainiens des plans militaires russes, y compris des détails précis des opérations au fur et à mesure qu’elles se déroulaient.

Selon le Times :

En l’espace de quelques semaines, la C.I.A. est revenue à Kiev et l’agence a envoyé de nombreux nouveaux agents pour aider les Ukrainiens. Un haut fonctionnaire américain a déclaré à propos de la présence importante de la C.I.A. : «Est-ce qu’ils appuient sur les gâchettes ? Non. Contribuent-ils au ciblage ? Absolument.»

Certains officiers de la C.I.A. ont été déployés dans des bases ukrainiennes. Ils examinaient les listes de cibles russes potentielles que les Ukrainiens s’apprêtaient à frapper, comparant les informations dont disposaient les Ukrainiens avec les renseignements américains afin de s’assurer de leur exactitude.

En d’autres termes, la CIA a aidé à diriger la guerre, faisant du gouvernement américain un participant à part entière, un cobelligérant dans une guerre avec la Russie dotée de l’arme nucléaire, bien que Biden ait affirmé que les États-Unis n’aidaient l’Ukraine que de loin. Et tout cela sans que le peuple américain ait le moindre mot à dire.

Le compte-rendu du Times constitue involontairement un réquisitoire contre les médias américains. Le journal écrit :

Les détails de ce partenariat en matière de renseignement, dont beaucoup sont révélés par le New York Times pour la première fois, ont été étroitement gardés secrets pendant une décennie.

Cet aveu signifie que ces secrets étaient «étroitement gardés» par le Times lui-même. Comme l’a fait remarquer l’ancien rédacteur en chef Bill Keller, la liberté de la presse signifie la liberté de ne pas publier, et «c’est une liberté que nous exerçons avec une certaine régularité». En particulier, pourrions-nous ajouter, lorsqu’il s’agit des crimes de l’impérialisme américain.

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