23-09-23-SAINT AUGUSTIN NE SE RESUME PAS A UNE PHRASE QUE L'EXTREME DROITE VEUT ANNEXER. DISCIPLE DE JESUS IL SAIT QU'ACCUEILLIR LE MIGRANT C'EST ACCUEILLIR JESUS

Marie Lavin
Hier, à 09:43 ·
Au Pape François qui, aujourd’hui et demain, prendra la parole à Marseille pour rendre hommage à tous les migrants morts en Méditerranée, je dédie ce superbe tableau de Philippe de Champaigne. Ne s’est-il pas trouvé en effet un histrion d’extrême droite pour inventer une citation de saint Augustin à seule fin de justifier sa haine de l’étranger et de critiquer les prises de positions pontificales sur ce sujet ?
Regardons-la cette toile du peintre de cour qu'est encore Champaigne alors qu'il commence à se rapprocher du jansénisme, que son œuvre devient peu à peu austère et épurée, regardons-la et admirons ce portrait de l’évêque d’Hippone qu'il représente en prélat érudit du XVIIème siècle.
Augustin écrit, il tient sa plume encore noire d'encre, son encrier et ses livres sont sur la table, sa bibliothèque est à portée de main. Il cherche le bon argument, il polémique, il se bat. Du pied en effet il écrase les ouvrages des hérétiques qu'il combat Caelestius (Célestius), Pelagius (Pélage) et Iulianus (Julien d’Éclane). Dans ce combat sa référence c’est la Bible qui trône à gauche du tableau.
Augustin est évêque, son mobilier atteste de l'opulence de sa fonction, sa chape si richement brodée en témoigne aussi qui le met, par le fermail, sous la protection du Christ au centre associé à Saint Pierre et Saint Paul, puis de Jean-Baptiste le long du pan du superbe vêtement.
Augustin est croyant, ce cœur enflammé à droite le proclame, il brûle de l'amour de Dieu, mais c'est aussi un intellectuel qui cherche à comprendre, à convaincre, qui lit, qui cherche, qui s'interroge, c'est ce qu'entend montrer le peintre quand il nous le propose auréolé de sa foi d'un côté et de la Vérité de l'autre (" la vie heureuse c’est la joie de la vérité" écrit Augustin dans les Confessions qui évoque aussi la "Veritas lucens", la Vérité qui éclaire), c'est autour de la tête du saint que les deux convergent dans une superbe diagonale de lumière.
La dominante dorée des couleurs dit la force, la chaleur de la foi d'Augustin, quelques touches de bleus (notamment les chaussures du premier plan), de rouge (le cœur, la doublure de la chape), le vert foncé du rideau derrière le saint ainsi que le blanc pur du plissé de l'aube contribuent à la valoriser.
Et à cet ancien candidat à la présidentielle, dont nous refusons d'écrire le nom, rappelons qu’au lieu de réécrire les Confessions de Saint Augustin pour les faire coïncider avec ses délires il ferait mieux de relire l’Evangile, notamment ce passage de Mathieu que le Pape aime à rappeler: « Car j'ai eu faim et vous m'avez donné à manger, j'ai eu soif et vous m'avez donné à boire, j'étais un étranger et vous m'avez accueilli, j’étais nu et vous m'avez vêtu….».
Merci Pape François.
Philippe de Champaigne (1602-1674). Saint Augustin. Huile sur toile. 78,7 x 62,2 cm. Los Angeles County Museum of Art.