23-02-23- MON EXODE EN 1940 RACONTE PAR MON GRAND PERE (1)
Léon Legrand, mon grand père, l'auteur de ce récit
SOUVENIRS DE GUERRE
Le neuf mai (1940), après quelques jours d'alerte, on venait d'apprendre que les congés étaient rétablis en Belgique. Il semble donc que l'on se trouvait devant une accalmie et, à l'inquiétude, avait succédé un sentiment de tranquillité relative. Ce soir-là, mon fils Paul (1) logeait chez moi et dormait dans ma chambre.
Le matin, vers quatre heures et quart, quatre heure et demie, je fus brusquement réveillé par des sonneries répétées de téléphone. Mon premier sentiment fut qu'il était arrivé un malheur dans la famille, et je descendis quatre à quatre sans même m'habiller. Au téléphone, je reconnus la voix de Mademoiselle Deg. qui me dit qu'il se passait quelque chose d'anormal, qu'il y avait un grand branle-bas à Saint-Médard (2) et des bruits anormaux dans l'air.
M'étant rendu au petit balcon, je ne me fis plus d'illusions, il y avait dans l'air un bruit assourdissant de moteurs d'avions, tel que je n'en n'avais jamais entendu de pareils jusque là.
Il n'y avait pas de doute, c'était la guerre, c'était l'invasion par surprise. Ayant ouvert la T.S.F., j'appris les mauvaise nouvelles de minute en minute ; d'abord le bombardement de la gare de Jemelles, le bombardement de l'aéroport de Nivelles, l'invasion par Bastogne, puis successivement toutes les nouvelles aussi désolantes les unes que les autres.
Ayant prévenu Paul, celui-ci après s'être habillé hâtivement, alla vers le pont et la gare et revint en me disant qu'il avait pu compter jusque quarante-cinq avions en l'air. Il fallait donc se rendre à l'évidence. Une nouvelle fois, nous étions envahis, et c'était la guerre avec ses horreurs. Dès les neuf ou dix heures, peut-être un peu plus tard, arrivait une troupe française, traversant le pont, et se dirigeant vers le Rivage. (2)
Je fus assez ahuri en voyant passer une troupe de cavalerie armée comme en quatorze, et sans être expert en matière militaire, je me demandais si l'on envoyait délibérément ces malheureux à la mort. Le matin se passe en va-et-vient.
Madame Aug. me remît un papier que lui avait confié mon fils Georges (1) et où il indiquait les mesures à prendre. Le choc avait été si rude que j'étais momentanément sans grande volonté. J'allai cependant prendre dans mon bureau l'argent de Georges que je parvins à découvrir ainsi que quelques papiers tandis que Madame Aug. emballait hâtivement l'argenterie avec les albums de photographie que je fis descendre provisoirement dans la cave à vins, avec l'appareil photographique de Georges, me réservant de prendre d'autres dispositions par la suite.
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(1) Mon grand Père Léon Legrand était sénateur au sein du pari catholique.
Paul, c'était mon papa alors agé de 36 ans.
Quant à moi, j'avais alors quatre ans ; un des plus anciens souvenirs de ma prime jeunesse est lié aux avions allemands envahissant dans un bruit terrible le ciel au dessus de notre domicile .
Georges, magistrat était son frère et donc mon oncle.
(2) Quartier de la ville de Dinant.
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(à suivre)
Léon Legrand
balchoyyvan13@hotmail.com
Le matin, vers quatre heures et quart, quatre heure et demie, je fus brusquement réveillé par des sonneries répétées de téléphone. Mon premier sentiment fut qu'il était arrivé un malheur dans la famille, et je descendis quatre à quatre sans même m'habiller. Au téléphone, je reconnus la voix de Mademoiselle Deg. qui me dit qu'il se passait quelque chose d'anormal, qu'il y avait un grand branle-bas à Saint-Médard (2) et des bruits anormaux dans l'air.
M'étant rendu au petit balcon, je ne me fis plus d'illusions, il y avait dans l'air un bruit assourdissant de moteurs d'avions, tel que je n'en n'avais jamais entendu de pareils jusque là.
Il n'y avait pas de doute, c'était la guerre, c'était l'invasion par surprise. Ayant ouvert la T.S.F., j'appris les mauvaise nouvelles de minute en minute ; d'abord le bombardement de la gare de Jemelles, le bombardement de l'aéroport de Nivelles, l'invasion par Bastogne, puis successivement toutes les nouvelles aussi désolantes les unes que les autres.
Ayant prévenu Paul, celui-ci après s'être habillé hâtivement, alla vers le pont et la gare et revint en me disant qu'il avait pu compter jusque quarante-cinq avions en l'air. Il fallait donc se rendre à l'évidence. Une nouvelle fois, nous étions envahis, et c'était la guerre avec ses horreurs. Dès les neuf ou dix heures, peut-être un peu plus tard, arrivait une troupe française, traversant le pont, et se dirigeant vers le Rivage. (2)
Je fus assez ahuri en voyant passer une troupe de cavalerie armée comme en quatorze, et sans être expert en matière militaire, je me demandais si l'on envoyait délibérément ces malheureux à la mort. Le matin se passe en va-et-vient.
Madame Aug. me remît un papier que lui avait confié mon fils Georges (1) et où il indiquait les mesures à prendre. Le choc avait été si rude que j'étais momentanément sans grande volonté. J'allai cependant prendre dans mon bureau l'argent de Georges que je parvins à découvrir ainsi que quelques papiers tandis que Madame Aug. emballait hâtivement l'argenterie avec les albums de photographie que je fis descendre provisoirement dans la cave à vins, avec l'appareil photographique de Georges, me réservant de prendre d'autres dispositions par la suite.
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(1) Mon grand Père Léon Legrand était sénateur au sein du pari catholique.
Paul, c'était mon papa alors agé de 36 ans.
Quant à moi, j'avais alors quatre ans ; un des plus anciens souvenirs de ma prime jeunesse est lié aux avions allemands envahissant dans un bruit terrible le ciel au dessus de notre domicile .
Georges, magistrat était son frère et donc mon oncle.
(2) Quartier de la ville de Dinant.
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(à suivre)
Léon Legrand
balchoyyvan13@hotmail.com