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Publié par YVAN BALCHOY

Remettons l’économie à sa place
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Échec dans la lutte contre le réchauffement climatique, dégradation des écosystèmes, incapacité à résorber la pauvreté, creusement des inégalités, sous-financement des soins de santé et de l’enseignement, insuffisance de personnel dans les secteurs liés à l’aide à la personne, pression sur les travailleurs, toute puissance de l’industrie agroalimentaire, impossibilité pour nombre de personnes de se loger décemment à un prix acceptable, coupes dans les budgets alloués à la culture et aux services publics, incapacité à remettre en cause le remboursement de la dette, mainmise des forces du marché sur les pouvoirs élus : tous ces problèmes auxquels font face nos sociétés (et la liste n’est pas exhaustive), ont une cause commune : l’emprise de l’économie sur la société. Mise en évidence par Karl Polanyi dans son œuvre majeure [1], cette caractéristique est ce qui singularise le capitalisme au moins autant que l’accumulation de profit sans limites et la concurrence. Or, et comme il l’avait déjà dénoncé, cette marchandisation de tout ce qui peut l’être ne peut conduire qu’à des catastrophes. Catastrophe dont, en son temps, la montée des fascismes et la seconde guerre mondiale furent parmi les plus terribles exemples. Les mises en garde de Polanyi sont d’une criante actualité et il est clair que le XXIe siècle ne saura échapper à des vagues de barbarie si l’économie n’est pas remise à sa place, à savoir réencastrée au service de la société, et non l’inverse.


La montée en puissance de l’économie

On peut faire remonter cette déconnexion entre la sphère économique et le reste de la société aux alentours du XVe siècle, au moment où, en Europe occidentale, le capitalisme prend son essor avec ce qu’on a appelé les « grandes découvertes », en fait le début d’une exploitation coloniale d’une grande brutalité. L’expansion européenne va en effet contribuer de manière décisive à l’autonomie des puissances marchandes, auparavant bridées par des règles sociétales telles que le pouvoir d’un Prince, la coutume ou la religion. En effet, alors que dans les sociétés antérieures, les marchands étaient soumis à l’autorité locale (certes de façons diverses selon les régions et les époques), le commerce au long cours échappait de facto aux réglementations diverses, par définition attachées à un territoire local [2]. David Graeber y voit également une explication de l’exploitation éhontée des ressources naturelles, notamment en raison de l’emprise des banquiers italiens sur les expéditions maritimes, poussant les conquistadors à surexploiter les ressources découvertes pour rembourser les crédits mis à disposition. Nous nous trouvons bien ici devant une des origines de la logique capitaliste, dans laquelle tout est secondaire par rapport à l’investissement [3]. Et Graeber, parlant des compagnies par actions, d’ajouter : « ces superstructures étaient conçues pour éliminer tout impératif moral autre que le profit » [4].

Cette autonomie de la bourgeoise commerciale (initiée au Moyen Âge par des marchands jouant sur les rivalités entre seigneurs féodaux) [5], l’appropriation des moyens de production (à commencer par les terres : la privatisation des communs appelée mouvement des enclosures), notamment via l’endettement, l’entreprise coloniale et l’instauration d’impôts sous forme monétaires, vont parachever l’instauration des rapports sociaux capitalistes.

Ce que ces quelques éléments historiques illustrent, c’est en définitive que la toute-puissance du marché n’est pas une destinée naturelle de toute société, à l’instar de ce que certains libéraux prêchent envers et contre tout. Au contraire, elle trouve son origine dans une trajectoire européenne singulière, laquelle, puisant sa source dans le commerce international et le contrôle des moyens de production par une minorité de possédants, n’a pu s’imposer au reste du monde que par la force et la coercition.

Lire l'article intégral sur le'excellent site INVESTIG'ACTION de Michel Collon

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