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Publié par YVAN BALCHOY

Photo solidaire Selim Hellalet

Photo solidaire Selim Hellalet

http://solidaire.org/articles/peter-mertens-ptb-nous-devons-arreter-ce-transfert-de-richesses-c-est-notre-devoir-de citoyen

Peter Mertens (PTB) : « Nous devons arrêter ce transfert de richesses, c’est notre devoir de citoyen »

Peter Mertens, président du PTB. (Photo, Solidaire Salim Hellalet)

Belgique

21 Juin 2016

Nick Dobbelaere

La résistance sociale qui s’embrase, l’idée d’une taxe des millionnaires qui rencontre de plus en plus d’adhésion, des grèves dont on fait porter le chapeau au PTB, d’excellents scores pour le PTB dans les sondages… Les raisons ne manquent pas pour un entretien avec Peter Mertens, le président du PTB, qui met les points sur les i : « Ce gouvernement ne s’arrêtera pas à moins de se heurter à de la résistance. »

Ces derniers mois ont vu l’agitation reprendre de plus belle dans le mouvement social. Il y a eu le contrôle budgétaire lors duquel le gouvernement est une fois de plus allé chercher l’argent dans la poche du citoyen ordinaire, mais aussi la loi Peeters qui fait du travail hyper-flexible la norme. Le 24 mai, 80.000 personnes défilaient dans les rues de Bruxelles. Il y a eu des grèves dans les services publics. Le 24 juin est un jour de grève générale. Mais le gouvernement a encore davantage dans le pipe-line. En juillet, il y aura un nouveau contrôle budgétaire, et on nous a déjà annoncé qu’il faudra encore économiser 3 à 4 milliards supplémentaires. « C’est seulement alors que l’on fera des coupes profondes », a déclaré le ministre Kris Peeters, celui qui trouve que « nous vivons tous au-dessus de nos moyens ». Les syndicats ont déjà prévu une manifestation fin septembre et une grève générale le 7 octobre.

Comment analysez-vous ces développements ?

Peter Mertens. Ce à quoi nous assistons maintenant, c’est la deuxième partie de la résistance sociale. La première partie a éclaté à l’automne 2014, lors du grand mouvement des syndicats, soutenu par le mouvement citoyen Hart boven Hard/Tout Autre Chose. Ensuite, nous avons connu une période de vent relativement calme. Les attentats terroristes à Paris et la crise des réfugiés ont été habilement utilisés par le gouvernement pour monter les gens les uns contre les autres et faire oublier à la population l’avalanche annoncée de taxes et de mesures d’austérité. Mais nous savions très bien – aussi dans cette période agitée – que l’opposition et la résistance contre le gouvernement n’avaient pas disparu et que la deuxième partie arriverait. Et c’est ce qui se passe maintenant.

Sept Belges sur dix estiment que gouvernement ne les écoute pas. Et ils ont raison

Mais, dans les médias, on entend parfois des personnalités affirmer que la proposition du PTB est impossible.

Peter Mertens. Le boxeur de légende Mohammed Ali, tout récemment décédé, a dit un jour : « Impossible, ce n’est pas un fait. Impossible, c’est une opinion. » Je partage tout à fait cet avis. Si la classe ouvrière dit : « Nous devons activer une partie du capital dormant du 1 % », le capital rétorque alors que c’est impossible. Eh bien, faisons en sorte que cela devienne possible. En France, cela a été fait. Aux États-Unis, il y a plusieurs villes, dont Los Angeles, où l’on envisage une idée de ce genre.

Les contre-arguments les plus souvent avancés ont été réfutés. Celui de la fuite des capitaux, par exemple. En France, il s’avère que seulement 1 % des contribuables fuient avec leur capital. 99% des très riches restent domiciliés en France. Telle est la réalité.

L'ancien ministre des Pensions Vincent Van Quickenborne (Open VLD) a mis en garde contre la bureaucratie que provoquerait l’introduction d’une taxe des millionnaires. Cela introduirait une fiscalité à la Big Brother.

Toute cette bureaucratie à la Big Brother dont on ne veut pas pour les grosses fortunes existe toutefois bel et bien pour les simples gens

Peter Mertens. Dans notre proposition, les capitalistes déclarent eux-mêmes leur fortune, tout comme vous et moi déclarons nos revenus sur notre déclaration de contributions. Pour cela, on n’a pas besoin de bureaucratie. Luc Coene, l’ancien gouverneur de la Banque Nationale, admet en outre que les moyens techniques existent bel et bien. C’est une question de volonté politique.

Le côté absurde, c’est que Van Quickenborne m'a lancé dans un récent débat : « Monsieur Mertens, savez-vous combien de fonctionnaires il faudrait engager pour cela ? », alors que des dizaines de fonctionnaires sont utilisés uniquement pour contrôler si les isolés sont bien des isolés, pour éplucher les factures d’électricité des personnes âgées, pour vérifier si des chômeurs de longue durée ne perçoivent pas indûment leur allocation. Toute cette bureaucratie à la Big Brother dont on ne veut pas pour les grosses fortunes existe toutefois bel et bien pour les simples gens. Ça, c’est pervers.

Nous avons besoin d’une système de contrôle pour le 1% de ceux qui, aujourd’hui, planquent leur capitaux au Panama et escroquent l’État.

Action des syndicats des services publics du 31 mai 2016 (Photo Solidaire, Salim Hellalet)

Ces derniers mois, nous avons vu que c’était surtout en Wallonie qu’il y avait de l’agitation sociale. À un moment donné, cette agitation a même été associée au PTB qui, dans le Sud du pays, déclencherait des grèves. Comment voyez-vous cela ?

Peter Mertens. Ceux qui prétendent cela ne voient manifestement pas que, dans toute l’Europe, c’est plus ou moins la même chose qui se produit. Prenons la France, par exemple. Elle connaît actuellement un énorme mouvement de protestation. Pourtant, on n’y trouve que peu de Wallons et absolument pas de PTB, et encore moins de Raoul Hedebouw. Pourtant, il y a de la résistance. En Espagne, voilà quatre ans que la résistance est à l’œuvre. En Grande-Bretagne et en Allemagne, les choses bougent aussi. Dans toute l’Europe, les gouvernements mènent une politique qui va chercher l’argent là où il n’est pas pour le donner à ceux qui en ont déjà en surabondance. Cette politique est contestée partout et, pour l’essentiel, c’est pareil dans tous les pays.

En France, le mouvement de protestation est énorme. Pourtant, on n’y trouve que peu de Wallons et absolument pas de PTB

J’ai lu la lettre ouverte de Madame Onkelinx et de Madame Kitir (présidentes de groupe à la Chambre, respectivement du PS et du sp.a, NdlR) dans laquelle elles s’en prennent au PTB. Je trouve cela triste, en fait. Non, les grèves ne sont pas le fait du PTB. Les grèves, les actions et les mouvements sociaux que nous connaissons aujourd’hui depuis la crise de 2008 ont lieu parce que l’establishment a opté pour une stratégie de la confrontation.

N’y a-t-il donc pas différences entre le nord et le sud du pays ? Bien sûr que oui. Beaucoup de facteurs entrent en ligne de compte. Le facteur le plus important est que, d’après les sondages, en Wallonie, seule une personne sur cinq voterait pour un parti du gouvernement actuel. Quatre personnes sur cinq ne soutiennent donc pas ce gouvernement. Imaginez-vous un instant qu’en Flandre, seuls les libéraux flamands – l’Open VLD de Gwendolyn Rutten – siègent au gouvernement fédéral. C’est une différence gigantesque dans le climat politique.

Mais, globalement, le facteur le plus important pour les grèves est toujours la situation économique. Et on constate alors qu’il y a, par exemple, plus de grèves à Anvers que dans certaines régions de Wallonie, qu’il y en a moins dans la province de Luxembourg qu’en Flandre. C’est ce qu’a analysé et chiffré le chercheur Stan De Spiegelaere de Poliargus.

Oui, la situation socio-économique est différente au sud et au nord du pays. Aujourd’hui, le chômage peut monter jusqu’à 25 % dans certains villes de Wallonie alors qu’il ne dépasse pas les 4 % en Flandre occidentale. Jusqu’en 1930, le centre économique du pays se situait en Wallonie. Depuis les années 1960, les choses ont changé. Le centre économique est désormais en Flandre, et plusieurs villes de Wallonie sont très durement touchées par la crise. Les mesures du gouvernement font plus mal là qu’ailleurs, personne ne peut le nier. Cette colère se combine à une plus forte tradition de combativité et au fait qu’à droite, en Wallonie, il n’y a quasiment pas de partis anti-etablishment. Oui, ce sont des différences.

Ceux qui détiennent le pouvoir tentent bien sûr de semer la division, mais le mouvement social est par essence un mouvement national qui, tout comme en 2014, évolue dans la direction d’un grand mouvement unique. C’est aussi ce que défend le PTB. En 2014, le mouvement reposait sur quatre axes : l’unité entre les secteurs public et privé, l’unité entre le nord et le sud du pays, l’unité entre les syndicats rouge et vert et l’unité entre les syndicats et les mouvements citoyens. Faisons en sorte que ces quatre axes soient maintenus.

Prendre nos responsabilités dans cette phase-ci se fait en construisant le contre-pouvoir

Photo solidaire Evy Menschaert

Photo solidaire Evy Menschaert

Le PTB a de très bons résultats dans les sondages. En Flandre, le parti dépasse le seuil d’éligibilité, en Wallonie, il devient le troisième parti avec 13,5% des votes. Avec de tels résultats, le PTB passerait de 2 à 10 députés fédéraux : deux de Flandre, sept de Wallonie et un de Bruxelles. A la question de savoir si, après les élections de 2019, le PTB serait prêt à entrer au gouvernement, Raoul Hedebouw a répondu : pas tout de suite. Ce à quoi le PS a rétorqué : vous ne voulez jamais prendre vos responsabilités.

Peter Mertens. Nous voulons prendre le plus vite possible nos responsabilités dans cette société. Et, dans cette phase-ci, cela se fait en construisant le contre-pouvoir. Que ce soit Bernie Sanders aux Etats-Unis, ou en Espagne, où en France, un contre-pouvoir est en train de se constituer ; il ne se limite pas à un parti politique, il est porté par un grand mouvement de gens conscients, qui s’affirment et défient le pouvoir établi. Actuellement, prendre ses responsabilités, c’est construire ce contre-pouvoir. C’est ce que nous faisons au PTB.

Peter Mertens: « Nous voulons transformer le contre-pouvoir en pouvoir, si ce pouvoir peut rompre avec la politique européenne » (Photo Solidaire, Karina Brys)

Si nous voulons transformer ce contre-pouvoir en réel pouvoir, il y a évidemment un certain nombre de conditions qui doivent être remplies. L’une est certainement que nous devons pouvoir rompre avec l’orientation politique de l’Union Européenne. Nous ne siégerons pas dans un gouvernement qui fait ce que le social-démocrate Hollande fait en France. Nous ne siégerons pas dans un gouvernement qui fait ce que le social-démocrate Samsom fait aux Pays-Bas. Aux Pays-Bas, il y a une expérimentation en cours qui va beaucoup plus loin qu’en France sur le plan de la flexibilisation et de la privatisation du secteur public.

Quel gouvernement a introduit les intérêts notionnels ? Quel gouvernement a supprimé les allocations d’attente des jeunes ? Cela, nous ne le ferons pas, et cela en dit long que ce soient Paul Magnette et Elio Di Rupo qui nous le reprochent. Si on veut des solutions de facilité instantanées, il faut acheter Royco-Minute-soupe. Si on veut du vrai changement, il faut travailler patiemment à de nouveaux rapports de force.

Pour lire intégralement l'article de Peter Mertens, tel qu'il figure dans "SOLIDAIRE", référez-vous à sa version en ligne ou à l'adresse qui figure en tête de cet article. (Y.B.)

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